“Radicalement réformistes” est un texte publié dans le n°2 de la revue Questions de classes. Je le republie sur mon blog avec l’autorisation d'un des animateurs de ce collectif. Ce court billet s’insérait initialement dans un ensemble de quatre contributions (Bernard Collot, Jean-Pierre Fournier, Grégory Chambat et donc moi même).
Si vous voulez lire ces autres
textes je ne peux que vous inviter à acheter le numéro en question intitulé “Pratiques d’égalité” et même vous abonner à cette revue militante.
Il n’y a pas que les Cahiers Pédagogiques pour penser son métier et son engagement dans l’École !
Et le travail exigeant du collectif autour de Questions de Classes (revue et site) est précieux en ces temps où la “radicalité” affichée dans les discours semble souvent s’arrêter aux portes de la classe. J’ai assez souvent fustigé le « gaucho-conservatisme » (et agacé plus d’un avec cette expression...) pour savoir que Questions de classes échappe à ce qualificatif !
Il n’y a pas que les Cahiers Pédagogiques pour penser son métier et son engagement dans l’École !
Et le travail exigeant du collectif autour de Questions de Classes (revue et site) est précieux en ces temps où la “radicalité” affichée dans les discours semble souvent s’arrêter aux portes de la classe. J’ai assez souvent fustigé le « gaucho-conservatisme » (et agacé plus d’un avec cette expression...) pour savoir que Questions de classes échappe à ce qualificatif !
À l’inverse (et de manière
péjorative), on m’a souvent rangé parmi les “pédagogistes”. Avec ce texte c’est l’occasion
de préciser ma position et de montrer que, pour moi, de manière positive ça
rime avec “réformiste”...
PhW
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« Nous ne
comprendrions pas que des camarades fassent de la pédagogie nouvelle sans se
soucier des parties décisives qui se jouent à la porte de l’école ; mais nous
ne comprenons pas davantage les éducateurs qui se passionnent, activement ou
plus souvent passivement, hélas ! pour l’action militante, et restent dans leur
classe de paisibles conservateurs, craignant la vie et l’élan, redoutant
l’apparent désordre de la construction et de l’effort.»
Célestin Freinet, L’Éducateur prolétarien n°
1, oct. 1936
Depuis de très nombreuses années le slogan du CRAP est “Changer l'école pour changer la société,
changer la société pour changer l'école". Cette tension est au cœur de
notre engagement. “Changer l’École”
parce que nous sommes d’abord des éducateurs et que la pédagogie c’est très
“politique”. Ce sont des valeurs mises en action. “Changer la société” parce que nous savons que tout ne se joue pas à
l’école et qu’il faut aussi faire advenir une société plus juste.
L'un va avec l'autre mais chacun est différent. En d'autres
termes, il ne suffit pas de construire dans sa classe et son établissement des
dispositifs pédagogiques mais il
faut aussi s'impliquer dans une transformation sociale. Mais inversement, il ne
suffit pas de se réfugier dans l'attente du grand soir pour penser que l'École
va se transformer d'elle même et ne rien changer dans sa pratique.
L’École ne peut pas tout, mais elle doit faire sa part…
Les travaux des sociologues comme les études internationales
nous montrent que l’École Française contribue non seulement à reproduire les
inégalités mais en crée. Il faut donc la transformer sans attendre. Et cela
signifie qu’on ne peut accumuler les préalables dans une sorte de
procrastination collective mais se saisir de tous les leviers et de toutes les
occasions. Le maximalisme peut conduire à l’immobilisme et peut sembler
quelquefois bien confortable comme nous le rappelle Freinet. Pour nous, militants
pédagogiques, l’ « éthique de conviction » doit se confronter à
l’ « éthique de responsabilité ».
“Réformiste” n’est ni un gros mot, ni une insulte. Lorsqu’une
réforme nous semble aller “dans le bon sens”, aussi modeste soit elle, il est
important de jouer le jeu et de l’accompagner. Tout en étant vigilant et se
donner tous les moyens pour qu’elle puisse être efficace. Il faudrait parvenir pour
cela à sortir de ces fausses oppositions binaires et des postures qui
pourrissent le débat. Il y a une certaine autonomie des champs et on peut
concevoir des réformes qui aillent dans le bon sens dans l’éducation alors même
qu’on est en désaccord sur bien d’autres sujets.
Réaffirmons-le : le combat pour de véritables
changements dans l’école ici et maintenant est indispensable si on a l’ambition
de réduire les inégalités dans la société. Nous n’allons pas attendre des
lendemains qui chantent et face à ce qu’on pourrait qualifier de « gaucho-conservatisme »,
nous sommes radicalement réformateurs.
Philippe Watrelot
31 mai 2015
➡︎ Pour compléter : “Utopistes en bande organisée” (sur ce blog)
Philippe Watrelot
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