samedi, décembre 13, 2014

Bloc-notes de la semaine du 8 au 14 décembre 2014





- Quel avenir pour les notes ? – Mal nommer les choses ? – Éducation Prioritaire - Cantines - .



Cette semaine encore, l’actualité éducative a été marquée par le débat sur la note et l’évaluation avec son acmé en fin de semaine avec les « Journées de l’évaluation ». Nous envisagerons dans ce “bloc-notes” la suite de ce débat avec les propositions du jury réuni à cette occasion mais nous continuerons à nous intéresser aussi à la manière dont ce débat a été traité dans les médias.
Il faut aussi revenir sur la réforme de l’éducation prioritaire car c’est le 17 décembre prochain que la ministre devrait révéler la nouvelle carte des REP et REP+ dans un climat de tensions et revendications.
Pour finir, nous irons faire un tour à la cantine, où ça ne sent pas toujours très bon...




Quel avenir pour les notes ?
À peine terminées les « Journées de l’évaluation », qui se sont tenues deux jours durant, les 11 et 12 décembre à Paris, le jury de la conférence nationale s’est réuni de nouveau, samedi 13 décembre, pour rédiger « quatre à cinq » propositions destinées à la ministre de l’éducation, Najat Vallaud-Belkacem. Ce seront des propositions “originales mais pas trop” selon son président Étienne Klein dans La Croix . Il ne s’agira pas, dit-il, de supprimer les notes pour les remplacer par un autre code. “Étant physicien, je sais qu’on ne change pas la nature d’un problème par un changement de variable ” rappelle t-il.
Étienne Klein a parait-il donné comme consigne à ses membres de « ne pas mettre en cause le travail des enseignants ». Il s’agira plutôt de répondre aux besoins des nombreux professeurs qui « se sentent désarmés, peu formés et ont besoin d’aide» en matière d’évaluation. L’une des pistes sera donc de «leur donner des outils supplémentaires pour leur permettre de modifier leurs méthodes».Officiellement, nous redit La Croix les recommandations seront adressées « mi-janvier » à la ministre de l’éducation, qui rendra des arbitrages.
Il y a plusieurs manières d’envisager la suite de ce grand débat et ses effets sur le système éducatif.
Quelques indices nous incitent à ne pas être très optimistes. Le discours très prudent du président du jury tout comme les propos de la Ministre nous font craindre à un rétropédalage... On peut craindre que tout cela n’aboutisse à un consensus mou (la spécialité de l’Éducation Nationale ?). Rappelons que ce sujet de l’évaluation (évoqué dans la loi de refondation qui parle d’“évaluation positive”) avait été lancé par Benoit Hamon mais qu’il n’avait pas eu le temps durant les 147 jours de son ministère de le mener à bien. Najat Vallaud Belkacem en a hérité. Mais le sujet a été aussi porté par la DGESCO et par le Conseil Supérieur des Programmes. C’est cette dispersion sur plusieurs organisations d'une même question qui est peut-être préjudiciable et conduire à un résultat faible au regard de l’ambition de départ.
Mais pour ne pas tomber dans la critique très répandue qui consiste à juger d’un dispositif avant qu’il ne soit abouti, il faut aussi voir les aspects positifs de ce débat. Peut-être aura t-il servi à faire la pédagogie de la pédagogie ? C’est que laisse entendre Michel Quéré, président du comité d'organisation de ces journées, interrogé par ToutEduc . Il exprime son optimisme et dit disposer "d'indices" qui donnent à penser qu'une "vraie réflexion" est à l'œuvre sur la distinction entre évaluation formative et évaluation sommative. En mettant ce sujet à l’agenda, on a peut-être contribué à amorcer cette réflexion et à faire évoluer (doucement) les pratiques. 
Si on avait mauvais esprit ( !) on se dit quand même que la typologie évaluation diagnostique/formative/sommative (formulée par Benjamin Bloom) ne date que de 1971... et qu’elle passe toujours pour du “jargon” pour bon nombre d’enseignants.
L’enjeu de ce débat n’est pas négligeable. Si la montagne accouche d’une souris, les dégâts peuvent être importants en termes d’images et par ricochet pour l’ensemble de la “refondation”. Car cela risque de perpétuer l’idée que l’École ne change pas. On ne peut s’empêcher de penser à cette phrase d’Antoine Prost à propos du sujet de son livre Du changement dans l’École (2014) : “tout se passe comme si l’on pouvait tout changer dans l’Education nationale sauf l’enseignement lui-même. Toutes les réformes sont possibles sauf la réforme pédagogique, malheureusement c’est la plus importante

Mal nommer les choses...
"Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde." (Albert Camus)
L'évaluation des élèves ne se réduit pas aux notes, selon des experts ” ce titre trouvé sur le site de 20minutes a de quoi faire sourire ou bondir, c’est selon... Pourtant, on croirait un titre issu du Gorafi , ce site satirique spécialisé dans les fausses informations ou de son cousin Edukactus . Comme si on ne savait pas que ces deux mots ne sont pas synonymes ! Pas besoin d’être un « expert » pour cela ! Tous les profs le savent (même ceux qui sont “pour” les notes )...
Et puis, on réfléchit. Et on prend conscience que pour beaucoup de personnes, notamment (mais pas que) hors de l'éducation nationale, ce qu'écrit 20Minutes a effectivement tout de la révélation ...Et comme nous le disions plus haut, Il est utile alors de faire la pédagogie de la pédagogie. Mais le rôle des médias n’est pas toujours celui là !
La revue de presse du jeudi 11 décembre de Laurent Fillion signalait le traitement de cette question par France Inter dans le 7/9. On y entend Patrick Cohen se moquer avec un ton condescendant de la question des notes, puis Léa Salamé qui réduit la question à une simple transcription d'un code (les chiffres) à un autre (les lettres ou les couleurs) et n'entend pas ce qu'essaie de dire Michel Lussault (pdt du CSP) pour le ramener toujours à la même question. On se demande comment il faut analyser cette surdité.

1ère analyse : la presse aime les débats binaires. Mais ce n'est pas suffisant.

2ème analyse : les journalistes (généralistes) ne travaillent pas les sujets d'éducation. C'est moins prestigieux que les sujets politiques ou internationaux. Ils s'en tiennent donc aux clichés puisqu'ils n'ont pas travaillé...

3ème analyse : les journalistes sont d'anciens bons élèves. Les notes, ça les a fait réussir. Alors la question de l'échec scolaire, ça leur passe largement au dessus de la tête...
4ème analyse : il est plus facile de faire de l’humour ou de l’ironie que de faire un “lancement” sérieux.
5ème analyse : Dans les écoles de journalisme, il n’y a pas de module sur l’éducation (au contraire de la politique, la diplomatie ou même les sciences). Seuls les journalistes éducation ont une connaissance du sujet acquise “sur le tas”...
Heureusement, on a pu lire et entendre aussi des enquêtes plus rigoureuses et qui permettaient de comprendre concrètement les alternatives possibles. Toujours sur France Inter, le même jour, le “zoom de la rédaction” donnait la parole à Marc Berthou, un enseignant qui travaille avec des “ceintures de compétences”. Dans L’Express, Sandrine Chesnel propose un reportage dans un collège de Seine Maritime et n’hésite pas à rentrer dans le détail des dispositifs mis en place par les enseignants. Même démarche pour La Croix qui prend l’exemple des professeurs d’EPS pour expliquer ce que veut dire “noter” les élèves sans les décourager .
Ce sont ces reportages là, plus que les nombreux débats un peu vains où tout le monde se croit autorisé à avoir un avis qui vont peut-être permettre à l’opinion publique de comprendre qu’“évaluation” et “notation” n’étaient pas synonymes...

Éducation prioritaire
REP ou pas REP ? la question qui fâche”. C’est le titre de L’Obs . Le 17 décembre prochain, Najat Vallaud Belkacem, doit annoncer la nouvelle carte de l’éducation prioritaire. Et cette réforme s’annonce à hauts risques pour la ministre. Sans jouer les prophètes, on peut penser qu’un regain des manifestations et des mouvements de protestation est probable à la rentrée de janvier...
La carte de l’éducation prioritaire date, grosso modo des années 80. De plus, on a eu une extension de la définition de l’éducation prioritaire qui a abouti à ce qu’aujourd’hui près d’un quart des élèves scolarisés relèvent à des titres divers de l’éducation prioritaire. La succession et l’empilement des labels et des dispositifs contribuent à rendre la carte illisible. La nouvelle carte des REP (1.082 dont 350 REP+) regroupe quatre critères :
- le % d’élèves défavorisés,
- le % d’élèves boursiers,
- le % d’élèves en Zone Urbaine Sensible,
- et le % d’élèves en retard en sixième.
Mais comme le pointe L’Obs le ministère a mal communiqué sur la façon dont cet indice était utilisé, suscitant la méfiance et la contestation, qui s’expriment depuis trois semaines. Un article synthétique du Monde (signé Samuel Laurent) considère que l’argumentation de la Ministre utilise des raccourcis quand elle affirme que la situation n'a pas évolué en trente ans, alors qu'elle a connu pas moins de quatre grandes réformes, qui ont fortement modifié les moyens accordés, leur ciblage et la philosophie même de l'éducation prioritaire .
Une tribune de Yannick Trigance, secrétaire national adjoint du PS à l'éducation sur le Huffington Post tente de faire la promotion de cette réforme considérée comme une “étape indispensable de la Refondation de l'école. Il rappelle aussi que “de surcroit, la Ministre a rappelé que dorénavant les moyens des établissements, au-delà du seul classement, seront attribués sur la base d'une allocation progressive correspondant à la réalité de leurs besoins. Et bien évidemment, un collège en Seine-Saint-Denis, même s'il n'est pas reconnu « Éducation prioritaire », n'est pas dans la même situation que certains situés dans l'ouest parisien. ”. L’idée de cette allocation progressive est d’éviter les effets de seuil.
Mais, malgré toutes ces explications cette réforme est très risquée. D’abord parce que les critères utilisés ne sont pas toujours aussi transparents et rigoureux qu’annoncés. Mais aussi parce que cette redéfinition des périmètres de l’éducation prioritaire se heurte à un sentiment général de dégradation des conditions de travail. Même si des moyens nouveaux sont débloqués, cela est vécu dans un cadre général qui est celui de l’austérité. Dans un tel contexte le rééquilibrage et la réaffirmation de “priorités” qui de fait exclut des établissements qui jusque là en bénéficiaient est donc mal vécu.
Il ne faut pas exclure non plus les arrières pensées syndicales. La mobilisation sur l’éducation prioritaire est aussi un moyen de retrouver les “fondamentaux” de l’action revendicative et de se reconstruire une légitimité militante.
Janvier sera t-il chaud ?

Cantines
«Restreindre l’accès à la cantine aux enfants dont les parents ne travaillent pas.» Ce sont les propos de Cyril Nauth, maire FN de Mantes-la-Ville (Yvelines) retranscrits par Libération . Il a dit réfléchir à cette mesure lors d’un conseil municipal début décembre , relayé par le Parisien ce lundi. C’est un phénomène qui n’est pas nouveau. Plusieurs communes privilégient les familles dont au moins un des parents travaillent avec comme argument le “manque de place”. En 2011, le quotidien L’Humanité en avait recensé au moins 70.
Malheureusement, si la jurisprudence française a reconnu le caractère « discriminant » d’une sélection à l’entrée des cantines sur critères socioprofessionnels, celle-ci demeure pour l’instant légale au regard des textes français. En effet, l’article 225-1 du Code pénal ne retient aujourd’hui que 18 critères de discrimination : origine, sexe, handicap, orientation sexuelle ou politique… Mais pas la pauvreté. Seule la Convention européenne des droits de l’homme mentionne explicitement l’origine sociale et la fortune. Ratifiée par la France, elle est censée être appliquée mais ne suffit pas : le protocole additionnel 12, portant sur l’interdiction générale de la discrimination, n’a en effet pas encore été adopté.
Puisqu’on en est aux repas de cantines qui ne passent pas, il faut aussi évoquer le cas du maire de Sargé-lès-Le Mans qui a décidé de ne plus proposer une viande de substitution lorsqu’un plat de porc était au menu de la cantine de l’école. La laïcité a bon dos.
On va faire une indigestion d’intolérance...

Bonne Lecture...

Philippe Watrelot


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dimanche, décembre 07, 2014

Bloc-Notes de la semaine du 1er au 7 décembre 2014





- Élections, piège à refondation ? – Débat sur l'évaluation : peut mieux faire...- .



Deux points à l’ordre du jour de ce bloc notes. Tout d’abord quelques analyses à propos des élections professionnelles dans l’Éducation Nationale. Puis une réflexion sur le débat dans l’opinion autour de l’évaluation et de la notation. Un débat navrant...





Élections, piège à refondation ?
La semaine qui vient de s’écouler a donc été marquée par la clôture des opérations de vote dans la fonction publique et notamment dans l’Éducation Nationale. Les personnels élisent par le biais d’une procédure de vote électronique leurs représentants dans des commissions académiques paritaires selon leur statut et leur grade. Et puis il y a aussi un vote au “CTMEN” le comité technique ministériel qui est l’instance de négociation où seules les organisations ayant des élus peuvent signer des accords. Ces élections qui ont lieu tous les trois ans sont donc importantes à plus d’un titre. Elles déterminent la représentativité syndicale mais aussi le volume des décharges syndicales et les moyens accordés à chaque organisation.
On pourra lire tous les résultats sur le site du Ministère . On peut cependant en extraire quelques chiffres significatifs à commencer par celui de la participation qui est de 41,7%. En d’autres termes, l’abstention est donc de 58,3%. Si maintenant on s’intéresse au CTM, la répartition des voix et des sièges est la suivante : FSU 35,5% (6 sièges), Unsa 21,89% (4) , FO 13,58% (2), Sgen 8,9%(1), Snalc 5,46% (1) CGT 5,5% (1).
Avec 35,5% des voix contre 40,6% en 2011, la FSU perd donc un siège même si elle reste le premier syndicat. Le SNALC retrouve son siège perdu en 2011. En revanche SUD perd son siège à ce comité. Force ouvrière et son positionnement hostile aux réformes poursuit sa percée de 2011 passant de un à deux sièges. Ce syndicat est désormais le troisième. Dans le camp “réformiste” l’UNSA progresse mais cela semble être au détriment du SGEN-CFDT qui a un positionnement assez proche. Comme le dit Marie-Christine Corbier dans Les Échos Au lendemain des premiers résultats des élections professionnelles dans l’Education nationale, l’interprétation s’avère bien délicate. Il serait trop simpliste de conclure à la victoire de tel ou tel camp, qu’il soit dit réformiste ou conservateur.”. On peut aussi considérer comme le dit Christian Chevalier de l’UNSA que la FSU se fait “manger par les deux bouts, c’est-à-dire par certains syndicats plus réformistes et par d’autres plus contestataires ”. L’appel du Collectif Racine – collectif d’enseignants associé au Front national – à voter pour le SNALC et FO a-t-il joué un rôle dans les bons scores des deux syndicats ? Difficile de savoir. C’est ce que pensent cependant certains analystes.
Les gagnants sont effectivement FO et le SNALC, qui ont en commun un discours réactionnaire, hostile à tout changement pédagogique. On ne peut exclure un vote politique en leur faveur, puisqu’un tiers des enseignants vote à droite, ce qui ne se reflétait pas dans le champ syndical. FO a bénéficié de ses positions très hostiles aux mesures gouvernementales. Mais sa progression ne doit pas être exagérée, d’autant que les autres syndicats radicaux (SUD éducation et la CGT) perdent un point et demi. [...] Au fond, ces élections montrent une mobilisation de l’électorat de droite… et le fatalisme du peuple de gauche désappointé. D’un côté le ministère peut se féliciter de l’affaiblissement de la FSU, principal obstacle à ses projets managériaux, mais de l’autre, elle ne peut la remplacer dans la négociation par FO ou le SNALC, qui incarnent l’hostilité à tout changement, quel qu’il soit.” c’est que déclare dans une interview au Monde Laurent Frajerman, spécialiste du syndicalisme enseignant, chercheur à l’Institut de recherche à la FSU.
Pour ma part, je crois que les clivages droite/gauche ne sont pas forcément très opérants pour décrire les tensions à l'œuvre dans le monde enseignant. Si je me risque à une grille “conservateurs/réformistes” (vous noterez que j'ai évité "progressistes"...!) cela me semble plus juste même si on peut bien sûr la contester. Et bien sûr c’est un clivage qui traverse même les syndicats (surtout lorsqu'ils sont majoritaires !).
Car en effet, la FSU est au pied du mur. En sièges, les “réformistes” ne forment pas une majorité. Pour signer des accords la FSU s'alliera t'elle avec deux organisations (FO et le SNALC) dont le conservatisme n'est plus à démontrer ? Ou bien s’engagera t-elle dans la voie de la réforme du système éducatif pourtant si nécessaire ? A défaut on peut craindre les blocages et le triomphe des conservateurs, et déclinistes de tout poil laissant le système éducatif en panne.
L’autre chiffre inquiétant est bien sûr celui de l’abstention. Près de 60%... On peut bien sûr incriminer la procédure utilisée pour voter. Il fallait en effet ouvrir un espace de vote à partir de son adresse de messagerie académique et d’un code reçu par ailleurs. Cela a pu en rebuter certains. Ça en dit surtout long sur la familiarité avec le numérique à l’heure où cela est sans cesse affirmé comme une priorité. L'école française n'est pas encore dans l'ère du numérique, si on veut qu'elle y entre, il faudrait réfléchir à utiliser l’informatique pour simplifier les tâches, pas les compliquer.
Mais il faut plutôt mettre en avant, me semble t-il, une analyse en termes de désyndicalisation et de défiance à l’égard de ce qui peut apparaitre comme des institutions éloignées à l’efficacité limitée. Si c'est pour obtenir une amélioration des salaires, c'est raté... La promesse des 60 000 postes a supprimé toute marge de manœuvre. Il n’y a plus rien ou presque à négocier et notamment pas assez pour permettre le rééquilibrage entre le primaire et le secondaire. D’autant plus dans le contexte général d’austérité budgétaire. L’amélioration des conditions de travail, n’est pas non plus à l’ordre du jour. Les créations de postes ne se voient que très faiblement puisque l’essentiel est destiné à rétablir le demi-service des enseignants stagiaires. La réforme de l’éducation prioritaire, réforme à hauts risques, peut même faire penser que pour certains établissements, les conditions de travail risquent de se dégrader. Tous ces éléments ne contribuent pas à mobiliser pour des élections dont les enjeux ne sont peut-être pas parus assez clairs pour tous.
Les résultats de ces élections interpellent donc tout aussi bien les syndicats eux mêmes que le gouvernement. Ils ne disent rien de bon sur la suite de la “refondation”...

Débat sur l'évaluation : peut mieux faire...
Navrant.Le débat sur les notes tel qu’il est traité par les médias est navrant...
Et je ne suis pas le seul à le penser. Plusieurs professeurs blogueurs font le même constat. Catherine Chabrun (ICEM-Pédagogie Freinet) déplore la faiblesse du débat, tout comme Lucien Marboeuf sur L’instit’humeurs ou encore Jean-Michel Zakhartchouk . Tous dénoncent les débats ineptes où chacun donne son avis sans avoir fait l’effort de se documenter et de lire les textes incriminés (en l’occurence le rapport sur l’évaluation des élèves remis par le CSP à la ministre). Notre ami et co-rédacteur de la revue de presse Laurent Fillion résume la situation avec humour et ironie : “Le jour où les medias organiseront un débat " pour ou contre la pêche au thon rouge" je pense qu'ils inviteront alors des profs qui évaluent sans notes pour connaitre leur avis éclairé sur la question. ”.
Heureusement quelques pépites surnagent. Comme cette très belle synthèse de Pierre Merle sur le site de la vie des idées . On a pu apprécier aussi l’édito politique de Thomas Legrand sur France Inter le mercredi 3 décembre où il s’interroge “Les notes à l’école sont-elles de droite ou de gauche ? ”. Quand on voit que les âneries sur le sujet sont assénées aussi bien à droite qu’à l’extrême gauche, on ne peut que redire ce que nous pointions plus haut : les clivages sur les questions d’école sont plus complexes que la dichotomie droite/gauche. Ensuite, Thomas Legrand conclut son éditorial par cette phrase qui résume assez bien les enjeux : “Les notes ne sont qu'une composante d'un système en panne”. Sur Médiapart Claude Lelièvre retourne le compliment à Luc Ferry qui trouvait dans le Figaro que le projet du CSP était “stupéfiant de niaiserie”. Et il a raison de rappeler que tous ceux qui s'excitent contre l'“esprit de 68" à propos des notes oublient que c'est en mars (et non en mai...) que s'est tenu le fameux “colloque d'Amiens" dirigé par un dangereux gauchiste nommé Alain Peyrefitte qui préconisait la suppression des notes...Pour être précis et remonter encore plus loin dans le temps, la critique des notes exprimée au colloque d'Amiens s'appuyait sur les travaux de la docimologie dont les premiers datent des années 30 : travaux de Laugier, commission Carnegie... Les enfants de 68 venaient à peine de naître !
Au passage, ce détour historique nous rappelle qu’il ne suffit pas de supprimer les notes pour changer la pédagogie. Lorsqu’en 1969 Edgar Faure suit les recommandations du colloque d’Amiens et interdit les notes (très beau rappel de cet épisode sous forme d’uchronie dans Rue89) cela n’a que peu d’effets sur les pratiques. Très vite le “génie français” et la force d’inertie inventèrent le “A -” et le “B+” et même le “A- -” et le “B+ +” ! Et les notes furent rétablies dès 1971 pour les classes à examen. La question n’est donc pas tant celle des notes que celle de la finalité qui sous-tend l’évaluation en France.
C’est là que, malgré tout, ce débat est révélateur. Car lorsque l’ineffable Ciotti dénonce “l’idéologie égalitariste”, quand dans les commentaires on lit qu’il faut bien habituer les enfants très tôt à être noté et sélectionné, on voit bien qu’il y a là une vraie rupture idéologique. Rappelons que les notes chiffrées ont été inventées (par les mandarins chinois) et institutionnalisées (en 1890) pour favoriser la sélection. Et tout notre système éducatif français s’est construit autour de cette logique. Sans verser dans le jargon, on a privilégié en France une évaluation sommative au détriment d’une évaluation formative.
Rappelons aussi, comme d’autres l’ont fait avant moi , que le problème n’est pas tant que la note chiffrée soit “décourageante” (on peut très bien humilier avec des smileys...) mais surtout qu’elle ne dit pas grand chose sur les acquis de l’élève. Certes, la note semble d’une lecture simple que tout le monde comprend. Mais elle dit très peu. Lucien Marboeuf le montre très bien dans son billet de blog. L’accusation développée par certains de “casser le thermomètre” ne tient pas. Si l’on veut une mesure plus fine et surtout utile pour progresser, alors il faut remettre en question les notes dont on sait la variabilité. Il faut surtout reconsidérer les moyennes qui fonctionnent selon le principe de la compensation et masquent les difficultés. On sait aussi que, dans notre système, la note est souvent une fin en soi et une fatalité: on travaille pour la note et celle-ci ne donne pas lieu ensuite à une remédiation. Lorsque Thomas Legrand pointe que “les notes ne sont qu'une composante d'un système en panne”, cela nous permet de rappeler que notre système est un des plus inégalitaires du monde. La méritocratie est bien malade lorsque l’on constate que ce sont toujours les mêmes (c'est-à-dire les plus privilégiés) qui réussissent contrairement à la promesse républicaine. Dès lors, la question devient celle de l’amélioration des moyens d’apprendre et c’est dans ce contexte qu’il faut se poser la question de l’évaluation.
Contrairement à ce qu’une logique binaire conduit à caricaturer, cela ne veut pas dire qu'il faut abolir toute forme de sélection dans le système scolaire. Je dis et bien d'autres avec moi, que la sélection peut se faire le moment venu mais pas avant et surtout pas tout le temps...16 ans marque dans la plupart des pays la fin de la scolarité obligatoire. Il n'est pas choquant qu'il y ait alors de la sélection et des orientations qui en résultent. Mais avant cette date, l’enjeu est d’abord de doter TOUS les élèves d’une même culture commune et tous les outils nécessaires pour évoluer dans la suite de sa scolarité (j'ose à peine parler de “socle commun"...). Et que durant cette période l'évaluation soit au service des apprentissages et pas une forme de sélection rampante et permanente devient alors une nécessité...
Le débat médiatique tel qu’il se déroule est affligeant. On sait bien qu’en France, il y a 66 millions d’“experts” de l’École... Mais il est dommage qu’on ait si peu de mémoire et qu’on ne voie dans ce débat que la dernière “lubie” de la ministre et de quelques pédagogues fous alors qu’il s’inscrit dans une longue histoire et de nombreux travaux (comme j’ai essayé de le montrer). On peut déplorer aussi que les alternatives qui existent et qui font leurs preuves en France, comme à l’étranger soient si peu connues et soient moquées sans être véritablement étudiées. On peut constater enfin que chez les enseignants la caricature de débat montre à la fois la difficulté à faire évoluer ses pratiques et l’inculture dans le domaine pédagogique. Il faut dire que l’attachement à la “note” est presque une question identitaire. Pourquoi critiquer un système qui vous a fait réussir et une note qui vous a permis d’avoir le concours qui vous a donné votre statut... ? 
La question centrale, celle qui devrait animer tous les débats, devrait donc être de savoir comment l’évaluation (et pas la seule notation qui n’en est qu’une des modalités possibles) peut être au service des apprentissages. Mais on est bien loin d’un débat sans fausses notes...

Bonne Lecture...



Philippe Watrelot

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dimanche, novembre 30, 2014

Bloc-Notes de la semaine du 24 au 30 novembre 2014





- Cursive ou manuscrite ?- L’École de demain selon NVB - Un débat sans fausses notes- .



Le bloc notes de l’actualité éducative de cette semaine commence par l’information qui a fait le buzz et suscité le plus de réactions. Mardi un article français repris d’un autre article de la BBC lui même inspiré d’un papier finlandais, annonçait que la Finlande allait abandonner l’écriture “manuscrite”. Nous faisons le point sur la réalité de cette information et sur la mécanique médiatique à l’oeuvre. A partir d’un excellent papier paru dans Les Échos, nous tentons de préciser les contours de l’école idéale selon Najat Vallaud Belkacem ou du moins de quelques axes de sa politique et de sa communication. On évoque enfin la fuite du texte du CSP concernant l’évaluation qui aurait été remis à la Ministre cette semaine.





Cursive ou manuscrite ?
C’est l’information qui a fait le plus de buzz et qui a suscité le plus de réactions sur les réseaux sociaux. Dans un supplément du Monde intitulé Les Clés de demain, le mardi 25 novembre, on annonce que “La Finlande va arrêter l'enseignement de l'écriture cursive”. L’article est repris et traduit d’un article de la BBC qui lui même traduit un article finlandais du quotidien Savon Sanomat . Et à partir de là et au vu des réactions suscitées par ce premier article (rien que sur mon “mur” Facebook, 130 partages et une soixantaine de commentaires), tout s’emballe. L’information est reprise un peu partout : l’Obs, Sud Ouest , Europe 1 , le site de TF1 , dans Le Figaro, on interroge Alain Bentolila qui s’indigne et les tribunes allant dans le même sens sont nombreuses. Dans L’Express, aussi on y consacre un article plutôt plus nuancé que d’autres. On y emploie le conditionnel et on s’intéresse à la question de l’écriture au delà de cette supposée information.
Et, (pour une fois !) il faut lire les commentaires à la suite de cet article. En particulier celui de “ProfFinlandaise” qui écrit ceci : “En tant que prof finlandaise, j'ai trouvé des points de vue assez intéressants dans cet article. Pourtant la nouvelle sur la reforme scolaire finlandaise n'a pas beaucoup à faire avec la réalité, mais se base seulement sur un blog de BBC qui a mal interprété un article dans un petit journal finlandais. Ne vous inquiétez pas donc, la Finlande n'abandonnera pas l'écriture manuelle, mais seulement cursive attachée au profit de détachée (si c'est le bon mot, excusez-moi mon français je suis finlandaise). De plus on commencera à enseigner la dactylographie systématiquement plus à tous les élèves. Ainsi, nos enfants gagneront les avantages de ces deux écritures parallèlement. Pas mal comme réforme, n'est pas?”. Signalons qu’au CRAP-Cahiers Pédagogiques nous avons eu aussi des informations provenant de Finlande et allant dans le même sens.
Et à la lecture de ce commentaire, on se rend compte que la mécanique médiatique est bien fragile... Ce qui aurait dû alerter c’est qu’elle repose sur une confusion entre écriture cursive (“en attaché”) et écriture manuscrite qui avait déjà été faite, il y a un an à propos des États Unis. En octobre 2013, la journaliste bi-nationale Hélène Crié-Wiesner publie sur son blog American Mirror hébergé par Rue89 un article sur l’abandon de l’écriture “en attaché” aux États Unis. Et elle commençait son article ainsi : “Au printemps, une info a couru en France : les écoles américaines n’enseigneront plus aux enfants l’écriture manuelle, ringardisée par l’usage des claviers. En fait, c’est faux, seule l’écriture cursive est abandonnée. Et la France est sur la même voie. ”. Cet avertissement aurait du inviter à la prudence. Mais, malgré les précautions prises par certains journalistes, c’est la confusion/simplification qui l’a emporté.
Donc résumons : en Finlande, comme aux États-Unis, ce qui est abandonné dans l’apprentissage ce n’est certainement pas l’écriture manuelle mais l’écriture cursive qui est elle spécifique à chaque culture. On est un peu dans la même situation que lorsque l’Allemagne a abandonné l’apprentissage de l’écriture gothique...
On ne va pas gloser sur les dérives de la presse où il arrive que, pressé par le temps, on ne vérifie pas les infos et on copie les uns sur les autres si on constate qu’il y a du buzz... Le plus intéressant est de s’interroger sur les raisons de cet emballement. On voit bien que derrière les réactions très vives, il y a une sorte de “fantasme numérique” qui marche dans les deux sens. Pour les uns c’est une suite logique de l’évolution du numérique, pour d’autres c’est un cauchemar techniciste. Cette pseudo-info nous en dit beaucoup sur notre position face à un monde qui change et les changements qui s’opèrent. Comme le dit très bien dans un échange avec elle, la journaliste Sandrine Chesnel qui a signé le papier nuancé de L’Express : la question de la Finlande est un prétexte d'actualité pour poser une question plus large : la place du clavier dans la production d'écrits des enfants, et des adultes aussi d'ailleurs. Et c’est pour cela que même si l’information est fausse toute la réflexion sur les fonctions de l’apprentissage de l'écriture manuscrite dans les mécanismes cognitifs suscitée par la presse est intéressante ! Il est dommage que ce soit à partir d’une information mal maîtrisée et qui peut être un beau sujet d’éducation aux médias, mais au moins le débat est lancé...

L’École de demain selon NVB
En déplacement dans la Drôme et l'Ardèche, il y a quelques jours, la ministre de l'Education nationale a précisé sa vision de l'école de demain. En visitant deux établissements censés « préfigurer » l'avenir, elle a évoqué les tablettes numériques , la découverte du monde professionnel et le rapprochement école-collège”. C’est le début de l’excellent article de Marie-Christine Corbier dans Les Échos du 27 novembre .
Dans les deux collèges inaugurés à l’occasion de ce déplacement, la place du numérique était forte avec notamment l’usage des tablettes. “Les tablettes permettent de mieux apprendre ”, vante la ministre, qui y voit “des perspectives immenses”. Aux collégiens qui l'interrogent sur sa propre scolarité elle confie, à dessein : “Je n'étais pas très bonne en maths, mais si j'avais eu une tablette numérique et des exercices interactifs, peut-être que j'aurais plus aimé ça ”… Même si elle déclare ensuite qu’ “ Il faut former les enseignants au numérique”, on est quand même toujours un peu dans le fantasme techno qui voit dans le matériel le vecteur des transformations pédagogiques. La ministre pourrait peut être lire avec profit l’interview de Marcel Lebrun dans EducPros . Ce spécialiste belge des questions numériques résume assez bien les enjeux : “Le numérique peut avoir un impact sur la pédagogie, à condition que celle-ci change. En effet, si les nouvelles technologies externalisent les savoirs, elles demandent aussi de mieux savoir utiliser les outils. [...] réfléchir aux outils sans se demander ce qu'ils vont modifier équivaut à mettre des emplâtres numériques sur des structures qui n'évolueront pas. ”.
Toujours lors de sa visite dans un des collèges, la Ministre a pu observer un projet de mini-entreprise, l'occasion d'avancer ses idées sur la découverte du monde professionnel, un autre axe de son école de demain. Rappelons, au passage,que Le Conseil supérieur des programmes (CSP) doit se prononcer début décembre sur le contenu du parcours de découverte du monde professionnel.“C'est formidable qu'au collège, on donne envie aux élèves de créer leur propre entreprise.” déclare la Ministre devant le projet présenté. L'école doit aider “ à s'orienter, à envisager sa place dans le monde professionnel, voire à nourrir et développer cette ambition folle de créer sa propre entreprise ”, poursuit-elle. . En disant cela, elle ne fait que reprendre les propos de François Hollande l’an dernier lors de son discours de clôture des assises de l’entrepreneuriat où il déclarait “Notre premier devoir, c’est de stimuler l’esprit d’entreprise dans notre pays. C’est d’abord le rôle de l’école ”.
J’avais consacré à l’époque un billet de blog à cette déclaration et il reste valable me semble t-il. Tout comme celui de Philippe Frémeaux dans Alternatives Économiques . Celui-ci écrivait “Si l'école française a un problème avec la transmission de l'envie d'entreprendre, ce n'est pas en ajoutant une discipline supplémentaire qu'on va le résoudre. [...] Si l'on veut que l'école encourage l'esprit d'entreprise, il faut au contraire qu'elle valorise et développe l'autonomie des élèves, leur prise d'initiative, leur sens critique, aussi bien individuellement qu'en groupe, car l'entreprise qui réussit n'est pas seulement une aventure individuelle mais le fruit d'un projet collectif.”. Pour ma part, je rajouterais que malheureusement trop souvent le problème de « l’esprit d’entreprise » c'est plutôt le discours des lobbys patronaux qui sont à la manœuvre sur ce sujet comme sur d'autres (les programmes, les manuels,...). En fait, on y entretient une confusion avec l'idée qu'il faudrait faire "aimer l'entreprise". Or, un contenu d'enseignement n'a pas à faire aimer ou à jouer sur l'émotion. Il s'agit de donner des clés pour comprendre le monde et pour y agir. Pas plus, pas moins...
Dans un autre établissement visité dans la foulée, Najat Vallaud-Belkacem décline un autre projet phare de sa politique : la réforme du collège, annoncée pour 2015. Et, avec elle, le rapprochement entre l'école primaire et le collège. Elle assiste en effet à un cours de mathématiques dont la particularité est d'associer élèves de CM2 et de sixième. “Cela correspond à cette école du socle que nous voulons construire, avec une continuité entre la fin de l'école primaire et le début du collège, pour éviter les ruptures que connaissent beaucoup d'élèves et les accompagner au mieux vers la réussite” commente la ministre.
Plus encore que l’esprit d’entreprendre, c’est peut-être le point qui risque de se heurter au plus de résistances. Car ici, on s’affronte à un noyau dur de l’identité syndicale. Pour le syndicat majoritaire dans le secondaire et au delà la fédération majoritaire, le champ de syndicalisation est fondé sur une séparation nette entre le primaire et le secondaire. Et on retrouve aussi derrière ces résistances, les critiques adressées au socle commun qui conduisent aussi à requestionner les séparations disciplinaires, cette fois-ci.

Un débat sans fausses notes
Ce n’est pas l’information divulguée par Le Monde qui risque de calmer les craintes de certains conservateurs. Le journal s’est en effet procuré une version (est-ce la définitive ?) de la contribution du Conseil Supérieur des Programmes au débat sur l’évaluation. Dans ce document remis jeudi 27 novembre par le CSP à la ministre de l’éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, on propose non seulement de supprimer les notes et les moyennes mais aussi de changer radicalement le brevet qui serait constitué d'une seule épreuve transversale accompagnée de contrôles en cours de formation.
En ce qui concerne les notes, le CSP préfère un barème de 4 à 6 niveaux, sur le modèle de ce qui se pratique dans de nombreux pays. Et pour la moyenne, “ On ne peut pas racheter sa faiblesse dans une discipline par sa force dans une autre, souligne Michel Lussault. Pour le président du CSP, une moyenne ne dit rien : “Un élève fort en mathématiques et faible en sport n’est pas un élève moyen au bout du compte.”. Selon le Monde le conseil rejetterait également le recours aux coefficients, considérant qu’aucune compétence ou connaissance n’est plus importante qu’une autre.
Pour le brevet, il s’agirait, en fait, de le transformer en épreuve de validation du socle. aux quatre épreuves de fin d’année – français, maths, histoire-géographie et histoire des arts –, le CSP préférerait en voir instituer une seule, transversale, “anonymée et définie nationalement” peut-on lire dans le document que s’est procuré le Monde. En sus, deux projets personnels – l’un réalisé en 4e, l’autre en 3e – seraient présentés à l’oral, et plusieurs évaluations organisées de la 5e à la 3e.
Ce document, qui aurait donc “fuité” ne devait, en principe, être rendu public qu’au moment de la Conférence nationale sur l’évaluation qui a lieu du 11 au 13 décembre 2014. Un Jury, composé d’acteurs et d’usagers du système éducatif, est convié à élaborer des recommandations fondées sur les résultats de la recherche, les connaissances scientifiques, et les pratiques de terrain, nationales et internationales. À l’issue de ces Journées, le Jury remettra ses recommandations à la ministre.
Pour finir ce bloc notes sur une tonalité militante, vous trouverez sous ce lien la contribution du CRAP-Cahiers Pédagogiques à ce débat sur l’évaluation

Bonne Lecture...



Philippe Watrelot


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samedi, novembre 22, 2014

Bloc Notes de la semaine du 17 au 23 novembre 2014





- Décrochage - Redoublement - Mérite - .



Trois thèmes dans ce bloc notes de la semaine éducative (et un refrain). Le décrochage avec un retour sur le plan annoncé ce vendredi par le Premier Ministre et la Ministre de l’Éducation Nationale. Le redoublement avec le décret paru cette semaine qui précise les règles en vigueur à partir de la rentrée prochaine. Et enfin une réflexion sur le mérite qui nous permettra de nous interroger sur les vrais clivages actuels en matière éducative.





Décrochage
Vendredi 21 novembre était annoncé le plan de lutte contre décrochage. C’était à l’occasion d’un déplacement dans le Nord que le Premier Ministre accompagné de la ministre de l’Éducation a fait cette annonce de 50 millions débloqués pour lutter contre le décrochage. Dans la revue de presse du jour, on rentrait dans le détail du plan et le contenu de l’interview que la Ministre a donnée au Parisien.
Le plan semble axé essentiellement sur la prévention du décrochage et la formation des enseignants et comme le souligne Marie-Christine Corbier des Échos , il comporte quelques mesures nouvelles et en recycle d’autres issues des plans précédents. Dans La Croix on parle même d’“un air de déjà vu”. Un numéro unique (0800 12 25 00) permettra aux jeunes et à leur famille de contacter un conseiller pour connaître les solutions proposées. Des dispositifs pour impliquer les parents seront généralisés, notamment l’expérimentation “ La mallette des parents”, lancée par la majorité précédente. Les enseignants seront formés pour, selon la ministre, “ détecter précocement les difficultés scolaires”. L’élève de 15 ans qui a des difficultés pourra “ faire une pause dans sa scolarité” pour un stage en entreprise ou un service civique afin de lui permettre de “ prendre du recul tout en restant sous statut scolaire et revenir ensuite avec une formation plus adaptée”, a précisé Najat Vallaud-Belkacem qui a refusé l’extension de la scolarité obligatoire à 18 ans pour un droit à un retour en formation . En 2012 déjà, le gouvernement avait fait des annonces identiques. La nomination d’un « référent décrochage » dans chaque établissement fera elle aussi, l’objet d’une « deuxième » généralisation…Par ailleurs, plutôt que de développer les micro-lycées ou les écoles de la deuxième chance, le ministère privilégie “ des structures de remédiation innovantes au sein d’établissements classiques”, au moins une par académie.
L’auteur de cette revue de presse s’étant vu refuser l’an dernier (par le Rectorat) un projet de ce type dans son établissement, ne peut que se réjouir de cette évolution mais avec une certaine circonspection (voire amertume)... De même, on peut espérer que la formation des enseignants ne se limite pas qu’à la formation initiale mais s’appuie sur une véritable formation continue. Si la formation dans les ESPÉ se limite au repérage du décrochage sous la forme de ce qui se passe aujourd’hui dans la “culture commune”, on peut aussi être inquiet sur son efficacité. Il ne s’agit pas seulement de faire des cours en amphithéâtre sur ce sujet. La problématique est d’abord pédagogique. Sans jouer sur les mots, tout autant que le décrochage, il faut travailler sur l’ “accrochage” et les moyens de maintenir ces élèves fragiles et démotivés dans le système. C’est-à-dire travailler avec des méthodes actives et en groupes interdisciplinaires sur la motivation et l’implication des élèves et la pédagogie différenciée. Expérimentons ! Innovons ! Mutualisons !

Redoublement
Plusieurs journaux ont titré sur le fait qu’à compter de la rentrée prochaine, le redoublement devra procéder d’une décision “exceptionnelle”. Ainsi, La Croix , le journal Le Monde ou encore le site d’information VousNousIls reprennent cette information.
Il est vrai que c’est l’actualité avec ce décret du ministère de l’éducation publié jeudi 20 novembre 2014. Mais ce n’est pas pour autant une nouveauté. On nous avait déjà fait le coup le 24 septembre dernier lorsqu’ Europe 1 tentait de présenter comme un scoop la suppression du redoublement. Dans le bloc notes de cette semaine-là, nous avions alors rappelé que cette disposition était déjà contenue dans la loi de refondation votée en juin 2013 par la représentation nationale. Et nous écrivions : “La focalisation sur cette question en dit long sur l'état du système éducatif et de l'opinion publique. 
D'abord, on voit que l'opinion s'accommode très bien d'un système qui sélectionne très tôt et dont la fatalité du redoublement n'est qu'un des symptômes. 
Ensuite cela nous montre bien la difficulté du système à innover et trouver des solutions alternatives et à favoriser la remédiation. 
Enfin, on ne peut s'empêcher de voir cet attachement au redoublement chez certains enseignants comme le symbole d'un pouvoir perdu alors que la profession se sent dans une logique de déclassement.. On pourrait reprendre mot pour mot ce que nous écrivions il y a deux mois et demi. C’est d’ailleurs ce que nous venons de faire !
Le décret paru jeudi 20 novembre au Journal officiel n’est donc qu’une application de ce principe contenu dans la loi. A compter de la rentrée 2015, e redoublement demeurera possible en cas de “période importante de rupture des apprentissages scolaires” par exemple en cas d'absence pour maladie ou pour des raisons familiales. Après l'avis positif du conseil de classe, une “phase de dialogue“ avec le chef d'établissement est prévue, et le redoublement ne sera alors possible qu'“avec l'accord écrit” des parents ou de l'élève s'il est majeur. L'autre cas concernera seulement les élèves en fin de 3e et de 2de, « lorsque la décision d'orientation définitive n'obtient pas l'assentiment des représentants légaux de l'élève ou de l'élève majeur ». Dans ce cas, ce seront l'élève ou ses parents qui, faute d'avoir obtenu le passage dans la classe ou filière souhaitées, demanderont un maintien dans le niveau actuel. Une autre disposition importante est annoncée dans le texte, l'élève redoublant devra bénéficier d' “un accompagnement pédagogique spécifique, qui peut comprendre notamment un programme personnalisé de réussite éducative
On risque de retrouver le débat sans fin sur le laxisme ou le manque d’“exigence” chez les déclinologues patentés de l’École. Or la vraie exigence c’est au contraire celle de la loi qui nous oblige à un devoir d’invention pour trouver (ou retrouver) des alternatives au redoublement. On pourra alors aller jeter un œil sur ce qui se passe déjà aujourd’hui dans un certain nombre d’établissement scolaires (par exemple avec ce reportage d’Alternatives économiques ) et mutualiser les pratiques plutôt que de se réfugier dans la déploration.
Signalons que le Conseil national d'évaluation du système éducatif (Cnesco) s'est aussi saisi de la question du redoublement, avec une conférence de consensus en janvier sur le thème «Lutter contre les difficultés scolaires: le redoublement et ses alternatives?».
Expérimentons ! Innovons ! Mutualisons ! (bis)

Méritocratie
Dans l’actualité éducative de la semaine, un article de synthèse mérite notre attention. Il s’agit d’un article de Maryline Baumard dans Le Monde où la responsable du service éducation tente de faire la synthèse sur la question de la méritocratie, “un sujet politiquement très puissant, mais [qui] n’est pas aisé à cerner. ”.
La journaliste essaie de faire le tour des écrits récents sur ce sujet, d’Elise Tenret, à Jérôme Krop, en passant par Marie Duru-Bellat et François Dubet. Pour Agnès Van Zanten, “Il est évident que la méritocratie n’a jamais existé, ni en France ni dans d’autres contextes nationaux ”. Alors que nous commémorons les cinquante ans de la publication de l’ouvrage de Bourdieu et Passeron “Les Héritiers, il est toujours utile de rappeler que les statistiques sont assez semblables à celles des années 60 : les enfants de cadres sont deux fois plus souvent diplômés du supérieur (62 % contre 31 %) que les enfants d’ouvriers. Et la dernière enquête Pisa a montré que la France est le pays où l’origine sociale joue le plus fortement dans l’accès aux diplômes. Eric Charbonnier, analyste à l’OCDE, rappelle que la situation a empiré “En 2012, les élèves de familles défavorisées courent trois fois plus de risques d’être en échec scolaire que neuf ans plus tôt.”.
Maryline Baumard rappelle que dans une interview de 2004 à Alternatives Économiques, François Dubet qualifiait cependant la méritocratie de “fiction nécessaire. Il reprend d’ailleurs cette affirmation dans une interview plus récente à Libération en Octobre 2014 où il rappelle que “dans une société démocratique affirmant l’égalité de tous les individus, le mérite est une valeur incontestable. Vous ne pouvez fonder des hiérarchies sociales justes que sur les mérites des individus - pour occuper une position sociale, il est plus juste que cela dépende du mérite que de la naissance. ”. Mais tout de suite après, il précisait “Le problème est lorsque vous hypertrophiez ce principe. Vous entrez alors dans un système brutal et injuste. Certes, il faut dégager de bons élèves, mais cela ne nous dispense pas de nous occuper presque prioritairement de ceux qui ne le sont pas. Il faut compenser le mérite par l’idée qu’on a des devoirs envers ceux qui n’en ont pas. Et ici il y a un vrai clivage idéologique.
“Idéologique”..., le mot est lâché. Car l’essentiel du propos de Maryline Baumard n’est pas de faire l’état de la recherche sur ce sujet mais de resituer ce débat dans le champ politique. Et elle montre assez bien que sur cette notion où tout le monde semble en apparence d’accord, il y a en fait des divergences réelles. “Sous Nicolas Sarkozy, la droite a mis en œuvre une conception de la méritocratie qui fait écho à ses convictions libérales. L’individu doit se prendre en main, affirmait le président : s’il réussit, c’est grâce à lui, s’il rate, c’est à cause de lui, pourrait-on caricaturer. [...] Les « internats d’excellence » lancés en 2008 par Nicolas Sarkozy reposaient sur ce principe : ils servaient à repérer dans les « collèges ghettos » quelques élèves travailleurs, à les sortir de leur milieu et à leur offrir des ­conditions idylliques d’études dans des établissements surdotés, pendant que le reste de l’éducation prioritaire était abandonnée à son sort, amputée de ses éléments moteurs.”. Or, la gauche, plutôt que d’insister sur la promotion de quelques élèves défavorisés mais méritants, préfère centrer son discours sur la question de l’égalité des chances. Il y aurait donc une “méritocratie de gauche” et une “méritocratie de droite”. “Comment l’école pourrait-elle être juste si elle abandonne au bord du chemin ceux qui ont le plus besoin d’elle ? ”, se demandait Vincent Peillon, le 5 juillet 2012, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, lors du lancement de sa refondation. Pour prendre le mal à la racine, le gouvernement avait donc décidé de tout miser sur les premières années d’école où se cristallisent un grand nombre d’inégalités. Mais cette volonté a t-elle été suivie d’effets ?
Penser l’École non pas en fonction de la sélection des meilleurs mais de l’attention portée aux plus faibles et aux moins méritants, voilà qui pourrait déjà siffler aux oreilles de quelques enseignants "politiquement à gauche et scolairement à droite", comme dirait François Dubet. La question n’est pas seulement de refaire fonctionner l’ascenseur social mais de se préoccuper aussi de ceux qui n’y ont pas trouvé place. Pour clore cette réflexion donnons encore une fois la parole à François Dubet Certes, il faut dégager de bons élèves, mais cela ne nous dispense pas de nous occuper presque prioritairement de ceux qui ne le sont pas. Il faut compenser le mérite par l’idée qu’on a des devoirs envers ceux qui n’en ont pas. Et ici il y a un vrai clivage idéologique 

Bonne Lecture...



Philippe Watrelot


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dimanche, novembre 16, 2014

Bloc-Notes de la semaine du 10 au 16 novembre 2014




- La guerre du Trois (sur vingt) aura t-elle lieu ? – Analyse d’une “non-information” - .

Retour du bloc notes après une absence de plusieurs semaines. On y évoquera la visite de Najat Vallaud-Belkacem dans un collège sans notes dans le Gers et la manière dont les médias et l’opinion réagissent sur ce sujet de l’évaluation. La guerre du Trois (sur vingt) aura t-elle lieu ?
On reviendra aussi sur le thème de l’innovation qui fait partie des sujets qui n’ont pas été traités par les médias et on se demandera pourquoi...



La guerre du Trois (sur vingt) aura t-elle lieu ?
Vendredi dernier, la ministre de l’éducation nationale, Najat Vallaud Belkacem est allée visiter un collège “sans notes” à Vic-Fezensac dans le Gers. . C’est dans le journal La Dépêche qu’on trouve une interview des enseignants initiateurs du projet et la présentation la plus complète du dispositif qu’on ne peut réduire à la seule suppression des notes.
Cette visite de la ministre se fait dans un contexte qui est celui du lancement prochain de la conférence nationale sur l’évaluation. La ministre a repris ce thème de travail lancé par son prédécesseur Benoit Hamon durant son court passage au ministère. Déjà à l’époque, plusieurs commentateurs avaient été très sceptiques sur l’opportunité de lancer ce débat sur l’évaluation craignant qu’il n’attise des conflits au sein du monde enseignant et de l’opinion publique. Cette fois-ci c’est Maryline Baumard du Monde qui développe cette argumentation. Pour elle : “Est-ce au ministre de dire aux enseignants comment noter leurs copies ? ” et elle prend l’exemple de la polémique sur les méthodes de lecture sous Xavier Darcos qui a braqué les enseignants et rappelle qu’ “au lieu de leur apporter les arguments scientifiques dont ils avaient besoin, il a crispé le débat en le politisant et a tué le sujet. C’est le risque que prend aujourd’hui la gauche en se saisissant d’une manière ostensiblement politique du dossier de l’évaluation des élèves.”. Et elle va plus loin dans son pessimisme avec ce paragraphe : “Pour la France, où beaucoup rêvent encore de coups de règle en fer sur les doigts et de blouses grises, le gouvernement livre sur un plateau le bâton pour se faire battre. Il propose le kit nécessaire pour laisser penser que la gauche française a encore de forts relents soixante-huitards. Que Najat Vallaud-Belkacem fasse sa première sortie sur « l’évaluation bienveillante » dans un collège qui a totalement aboli les notes ne contribuera qu’à alimenter un peu plus le moulin à caricatures.
D’abord faut-il considérer que les enseignants n'ont aucun compte à rendre à quiconque sur leur manière d'évaluer ? Drôle de conception... Certes le risque existe d’une certaine crispation. Mais est-ce une raison pour ne rien faire. Car on peut aussi penser que le débat en vaut la peine. Et qu’il peut permettre de faire la « pédagogie de la pédagogie ». Car, comme le note dans la suite de son article, la journaliste du Monde, cela a au moins le mérite de mettre ce sujet à l’agenda et d’éventuellement faire réfléchir les parents et les enseignants sur ce sujet. Un sujet majeur à plus d’un titre. D’abord parce que la question de la notation est au cœur de notre système républicain. Les notes ont été inventées pour servir la sélection. Il n’est pas interdit de réfléchir sur la nécessité de réserver cette sélection à certains moments de la scolarité plutôt que d’en faire un élément quotidien en oubliant que l’évaluation (qui ne se réduit pas à la notation) doit être aussi au service des apprentissages. Ensuite, on le sait bien, l’évaluation lors des examens conditionne une bonne partie de la pédagogie en amont. On enseigne pour préparer à l’examen...Enfin, on peut dire que l’évaluation et le débat sur la note est un bon analyseur non seulement des tensions qui traversent l’École mais toute la société française. Voulons nous une école et une société dure avec les faibles et fondée sur une sélection qui n’est plus méritocratique ou une société plus juste et qui cherche à faire progresser et réussir ?
Pour voir les tensions et blocages qui traversent l’opinion, il suffit de lire les commentaires qui suivent les articles pour s’en rendre compte. On y retrouve les vieilles accusations de naïveté et de “leurrer” les élèves en les maintenant dans “le monde des bisounours”. Notre École et notre société sont marquées par cette posture cynique et ce pessimisme face à toute évolution. C’est ce que notre ami Jean-Michel Zakhartchouk dans un très bon billet de blog sur ÉducPros appelle “les eaux glacées du ricanement cynique”. La “bienveillance” n’est pas un gros mot et on peut juger de la bonne santé d’une société à la manière dont elle traite ses enfants.
Il y a derrière ces oppositions à une évolution de l’évaluation, une logique qui est celle du mistigri, ce jeu où on se refile la mauvaise carte. “J’en ai bavé, alors pourquoi ceux qui me suivent n’en baveraient pas à leur tour ?. Mais il y a aussi des questions identitaires. L’attachement aux notes est aussi lié à sa position dans la société. “Pourquoi critiquer et remettre en cause un système qui m’a fait réussir ?” . Et parmi ceux là, les enseignants n’y sont pas les moins attachés. Car la note, c’est, au final, ce qui leur a donné leur légitimité avec la réussite à un concours.
Le débat sur l’évaluation n’est pas vain. Mais est-il bien posé ? Fait-on vraiment la « pédagogie de la pédagogie » ? Lorsqu’on lit les titres de la presse, lorsqu’on écoute les débats à la télévision ou la radio, on se dit que ce n’est pas toujours le cas. D’abord ce thème est souvent réduit à la seule question des notes et dans une logique très binaire du “Pour ou contre” sans nuances. On aimerait lire un peu plus que la question n’est pas forcément des notes en elles-mêmes ni même de la “bienveillance”. L’enjeu c’est de savoir comme nous le disions plus haut à quels moments il faut limiter la logique de sélection et comment faire de l’évaluation un réel outil au service des apprentissages. Ceci n’est pas une formule creuse. Très concrètement cela signifie que, plus que la note, c’est la moyenne qui pose problème en reposant sur un système de compensation (une difficulté est compensée par une réussite) qui masque les difficultés. La note est trop souvent vécue comme une fatalité alors que l’évaluation devrait être le point de départ d’un travail de remédiation. C’est là que se situe la vraie “exigence” brandie comme un étendard par ceux qui pensent être les seuls à la détenir.
On admettra que ce n’est pas facile d’apporter de la complexité dans un tel contexte de crispation. Mais la visite de la Ministre et la volonté de mettre les projecteurs sur cette question hautement pédagogique... et politique ! Il reste à espérer que ce débat ne soit pas dévoyé. C’est la responsabilité de chacun : enseignants, personnel politique et médias...

Analyse d’une “non-information”
Connaissez vous le Conseil National de l’Innovation et de la Réussite Éducative (CNIRÉ) ? Cette instance mise en place en 2013 (et dont je suis membre suppléant) est présidée par le sociologue Didier Lapeyronnie. Celui ci a remis son rapport , (consultable en ligne) à la ministre Najat Vallaud-Belkacem le 10 novembre dernier. Qui connait cette instance ? Qui a entendu parler de la remise de ce rapport ? Personne ou presque...
On me dira que des “Comités Théodule” existent dans tous les secteurs et que la presse et l’opinion ne s’intéressent pas forcément aux rapports qu’ils produisent. Mais il est curieux de constater cependant que ce rapport du CNIRÉ et les préconisations qu’il contient sont potentiellement des sujets de polémique dont la presse qui en est si friande aurait pu s’emparer. Quand on propose, par exemple, de plus ou moins supprimer ou du moins de changer radicalement les missions de l’inspection, il y a de quoi alimenter quelques débats...
Mais ici, on ne peut pas seulement incriminer les médias. Il faut dire en effet que la remise de ce rapport s’est faite en catimini. Seule une photographie prise dans le bureau de la Ministre et publiée sur le site du Ministère le 10 novembre, témoigne de cela. Il n’y a pas eu, à ma connaissance, de conférence de presse. Et donc pas d’articles de la presse généraliste non plus.
Une dépêche du site d’informations Touteduc et une autre dans le Café Pédagogique évoquent cependant ce rapport et ses principales conclusions.
Sur le site des Cahiers Pédagogiques, vous pourrez en lire aussi une analyse par Yann Forestier. Pour lui, le rapport évite un écueil celui du catalogue de “bonnes pratiques” et se concentre surtout sur les moyens de créer les conditions du changement et d’une structure plus favorable à l’innovation. : il s’agit d’« augmenter l’autonomie, la responsabilité, la réflexivité et l’accompagnement » des acteurs. Et il en détaille les principaux leviers parmi lesquels on signalera la réorientation du travail de l’Inspection vers l’évaluation et l’accompagnement d’équipes, la définition d’une véritable politique de formation à l’échelle de l’établissement et du bassin, ou encore l’élection du président du conseil d’administration parmi des personnalités extérieures. Au quotidien, la « réorganisation de la semaine-type de l’enseignant » ou l’institution d’heures de concertation prend en compte l’obstacle de la gestion du temps, dont la rigidité est génératrice de routine.
Mais Y.Forestier pointe aussi les manques du rapport : “Rien n’est dit sur les modalités des examens ou les procédures d’affectation des enseignants. La forme des programmes scolaires, sujet important lorsqu’on prétend accorder davantage d’autonomie aux acteurs, n’est pas non plus évoquée. L’orientation, bien que signalée comme un casus belli entre parents et enseignants, reste en jachère. ”.
Est-ce juste un problème de calendrier avec la proximité avec le 11 novembre ? On peut s’étonner que ce rapport trouve si peu d’échos auprès des commentateurs et des acteurs de l’éducation. On retrouve dans quelques commentaires des relents d’“aquabonisme” et du cynisme évoqué plus haut... Cela laisse penser que cette “non-information” est peut être le symptôme que la problématique du changement de l’École n’est plus vraiment à l’ordre du jour. Le changement c’est maintenu ?

Bonne Lecture...



Philippe Watrelot

vendredi, novembre 07, 2014

WISE 2014 : Questions sur la créativité



WISE J3 (jeudi 6 novembre 2014)


Suite et fin du WISE. C’est l’occasion en guise de bilan de revenir sur le titre donné à ce sommet (Imagine, Create Learn – Creativity at the heart of éducation) et de réfléchir sur cette notion de créativité qui a été dans tous les discours pendant trois jours.


Suite et fin
Les journées se suivent et se ressemblent un peu. On commence toujours par une réunion en plénière avant des travaux dans les ateliers. La séance de ce jeudi matin avait pour thème “Let’s be créative !”. Et l’exposé initial était proposé par Paul Tough auteur de “How children succeed". Pour lui, persévérance, créativité, optimisme et bien d’autres attitudes ne sont pas des traits de caractères, ce sont des compétences qu'il faut construire. Selon lui, la créativité  suppose que l’on soit capable d’apprendre de ses erreurs et d’analyser la manière dont on apprend et on agit (il parle bien de métacognition). On pense souvent, dit-il, que la créativité a à voir avec la liberté mais ça a surtout à voir avec le “cran” (grit) et la persévérance. Pour lui, une des choses les plus  importantes que peuvent faire les enseignants est donc d'apprendre aux élèves à gérer l’erreur. Mais bien sûr, la gestion de l'échec ne peut marcher que si les enseignants croient en la capacité de réussite de leurs élèves. La table ronde qui a suivi a essayé de repérer les blocages qui gênent la créativité. Nous y reviendrons.
La deuxième partie après l’inévitable coffee break, proposait plusieurs choix. Pour ma part, je me suis intéressé au jeu. La conférence introductive au thème était donnée par le Pr. James Paul Gee. Celui-ci a montré les mécanismes d’apprentissage qui étaient favorisés par le jeu (aussi bien les jeux de plateaux que les jeux vidéo). La table ronde a été assez interactive et vivante et un des intervenants a même fait se lever tout l’amphithéâtre pour...jouer.
Après la pause repas, retour en plénière pour la séance de clôture. L’occasion d’entendre un discours très émouvant d’Ann Cotton la lauréate du prix Wise 2014. Elle est revenue sur son parcours et son projet Camfed (campaign for female éducation) . Pour elle, la cause de la non-scolarisation des filles n’est pas d’abord culturelle mais avant tout économique. C’est la pauvreté qui oblige à faire des choix dans l’éducation des enfants et c’est là que la préférence pour les garçons intervient. Pourtant selon elle « Rien n’a plus d’effets pour une nation que la scolarisation des filles, dans tous les domaines : une fille éduquée a des revenus 25 % supérieurs à ceux d’une fille analphabète. Elle est capable de mieux se prémunir contre tout type de virus ; elle a notamment trois fois moins de risques d’être malade du sida. Elle est plus autonome, se marie et a des enfants plus tard. Ses enfants sont en meilleure santé, et, à leur tour, ils ont plus de chances d’aller à l’école. Enfin, elle contribue à la bonne santé économique du pays et au processus démocratique.» c’est ce qu’elle déclarait dans une interview proposée par Le Monde dans son édition du 4 novembre 2014.
Après ce très beau discours, un dernier panel (c’est ainsi qu’on nomme ici les tables rondes) a rassemblé Jack Lang, Charles Leadbeater un expert anglais et une étudiante Wise. Pour la première fois, on a donc entendu une intervention en français (il y avait des casques de traduction simultanée) puisque l’ancien ministre et aujourd’hui président de l’Institut du Monde Arabe a prétexté un “anglais rustique” pour pouvoir s’exprimer en français. Ce choix de langue a déclenché une mini vague de francophonie puisqu’on a eu droit ensuite à quelques questions du public exprimées en français par des africains ou des quataris. Et curieusement cela a aussi déclenché des questions sur le système éducatif français que l’ancien ministre a jugé trop sélectif et « bon pour les bons, mais ne parvenant pas à répondre aux problèmes de ceux qui ont des difficultés d’apprentissage ». L’expert anglais, pour sa part a rappelé qu’un système inégalitaire ne peut pas être jugé efficace...
Le discours du président du WISE a ensuite clos officiellement  ce sixième sommet.


Questions sur la créativité.
Il est difficile de faire un bilan après trois jours menés à un rythme effréné. Mais en guise de conclusion on peut proposer de revenir sur le mot-clé de ces trois journées : la créativité.
(Avant d’aller plus loin dans cette tentative de réponse à ces questions, je dois dire que cette partie de texte s'appuie sur les contributions des lecteurs de mon mur Facebook aux questions que je leur ai posées. C’est donc une forme d’écriture collaborative.)

Qu’est-ce que la créativité ? et pourquoi est-ce important ?
Le terme est revenu sans cesse dans la bouche de tous les intervenants. Mais peu ont pris la peine de le définir tant il semblait évident. Pourtant, ce n’est pas aussi simple que cela même si on peut repérer quelques constantes. D’abord évidemment la créativité a à voir avec l’innovation et la capacité à créer quelque chose de nouveau et d’original. Mais c’est aussi la capacité à trouver des solutions à un problème. Des solutions et pas une seule (flexibilité), ce qui suppose la divergence voire la déviance. Et l’acceptation du hasard et de l’erreur. Car il faut aussi rappeler que la création, si elle est souvent dans les représentations associée à l’image de l’“éclair de génie” est en fait un processus lent, itératif fait d’essais et d’erreurs où l’on se questionne sur ce que l’on est en train de faire. 
“La créativité c'est l'intelligence qui s'amuse”
Avec cet essai de définition, on voit bien le lien avec les mécanismes d’apprentissage. Fondamentalement l’acte d’apprendre est une forme de créativité puisqu’il s’agit de créer des liens et des connexions nouvelles dans notre cerveau. Si la créativité est souhaitable c’est donc d’abord parce que c’est la condition même pour apprendre ! La simple reproduction d'un exercice ne suffit pas à inférer qu’on a appris et qu'on maîtrise un savoir, il faut pouvoir mobiliser ses ressources dans un contexte nouveau.  Et la gestion de l’erreur évoquée par Paul Tough est aussi un élément important de la construction des connaissances et des compétences.
Et la créativité n’est pas seulement au coeur des apprentissages mais est aussi la condition de l’enseignement. Enseigner n’est pas (encore !) un métier standardisé et taylorisé. C’est un artisanat où l’on doit trouver les meilleurs moyens de répondre aux besoins spécifiques de ses élèves. Et cela passe forcément par un processus de création.
Bien sûr la créativité a aussi d’autres enjeux. Proposer une formation qui favorise la créativité et créer les conditions favorables à une culture de l’innovation, cela a évidemment des effets économiques. Cela a été dit explicitement à de nombreuses reprises au cours du sommet : des individus innovants sont de plus en plus nécessaires dans un contexte incertain. Et l’économie de la connaissance repose évidemment sur l’innovation économique et sa maîtrise.


Est-ce que la créativité s’enseigne ?
Lors du diner de gala, j’étais assis à côté d’une enseignante allemande vivant en Nouvelle Zélande et qui s’est présentée à moi comme “professeure de créativité”. Elle travaillait dans l’enseignement supérieur et animait des ateliers où elle mettait les étudiants dans des situations de création.
Pour un français cela peut sembler curieux (sauf peut-être pour ceux qui travaillent dans des écoles d’art appliqués...) On a tendance à voir de manière spontanée la créativité comme une disposition, un trait de caractère, presque de l’ordre de l’inné...
Pour Paul Tough l'intervenant du jeudi matin, la créativité tout comme la persévérance ou l’optimisme ne sont pas des traits de caractère, ce sont des compétences qu'il faut construire. Dès l’instant où on fait cette hypothèse, il peut être alors question de ressources, de modalités favorables etc...
C'est un peu la même problématique que pour l'oral. On peut dire d'un élève “il est réservé, c'est son caractère” et ne jamais le faire travailler l'oral ou considérer que c'est une compétence qu'il faut développer ! C’est une vraie difficulté qu’on retrouve avec le débat sur les compétences. Si (avec du mal... !) certains admettent qu’il peut y avoir des compétences liées à des savoirs, cela devient plus difficile dès l’instant où on parle de compétences sociales (et qu’on appelait autrefois “savoir-être”). A la rigueur dans les petites classes mais dans le secondaire vous n’y pensez pas... Pour ceux là ce serait évaluer la “personnalité”.
Peut-être pourrait-on s’accorder sur l'idée qu’il y a des dispositifs, des organisations de classe, des formes d’enseignement qui favorisent plus ou moins la créativité des élèves (et aussi des enseignants...) ? 

Comment mettre en place les conditions de la créativité ? Et qu’est-ce qui bloque ?
Repérer ce qui bloque peut être un moyen par un raisonnement a contrario de définir les conditions pour faire vivre la créativité.
Le premier jour du WISE, Ronald Beghetto s’interrogeait sur les conditions favorables et les blocages et dénonçait la “pédagogie de la réponse” comme  un frein à la créativité. On ne propose pas des problèmes à résoudre mais on pose des questions à un élève qui essaie de deviner ce qui ferait plaisir à l’enseignant...
“Je suis très créatif, et les gens créatifs ne craignent pas d'échouer”
Poser les bonnes questions, observer qu'il n'y a pas toujours une seule réponse à une question et que le problème est ouvert ... Faire admettre aux élèves que le chemin est tout aussi important que la réponse  elle même. Travailler avec les élèves, comme nous y invitait Paul Tough,  à gérer l’erreur et l’échec... Autant de pistes pour chaque  enseignant au service d’une évolution modeste mais durable des pratiques. 
Une très belle citation pourrait résumer cette posture éducative : “Agis en sorte qu'autrui puisse augmenter le nombre de choix possibles”(Camus)
Plus globalement, on est créatif dans un environnement où les possibles sont multiples et riches, où l'on est invité et encouragé à faire preuve d’autonomie. Cela suppose des situations où on n’est pas inhibé par des jugements qui tombent comme des couperets.
Un autre frein à la créativité peut se trouver dans l’excès de contrôle. Pour beaucoup d’enseignants, l’autonomie et a fortiori la créativité, c’est le chaos, le désordre ! L’enjeu se situe donc dans la posture de l’enseignant. Celui-ci doit donc être capable de lâcher prise et de s’autoriser à accepter de ne plus être dans une position centrale et d’avoir l’illusion de tout contrôler.
Au delà de l’enseignant dans sa classe, c’est tout le système éducatif qui doit être interrogé. Lorsque j’ai posé la question dans les réseaux sociaux où je suis présent, tous ceux qui m’ont répondu l’ont fait en constatant que la créativité des élèves et encore plus celle des enseignants n’était pas encouragée dans le système scolaire. Mais les constats sont les mêmes au niveau international si l’on entend bien ce qui s’est dit au WISE. D’abord parce que dans de très nombreux systèmes et la France en est un exemple ultime, les programmes définissent non seulement ce qu’il faut apprendre mais aussi la façon de l’apprendre. Lorsqu’on est à ce point obsédé par les procédures, comment laisser de la place pour la créativité ? La question est donc aussi politique. Veut-on  un enseignant concepteur ou créatif ou applicateur ? On n’a pas le choix. Dans un contexte de plus en plus incertain et changeant, on a besoin de créativité.
Celle-ci est en effet souvent le produit d’un écart par rapport à une norme, une coutume une autre manière d’envisager les solutions et d’un certaine façon, une forme de déviance. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle rejoint la problématique de l’innovation. Et bien souvent l’originalité, le “pas de côté” sont mal vus par les collègues d’un établissement même si l’institution peut par ailleurs soutenir la démarche. Tony Wagner posait la question durant la conférence inaugurale : « Chaque entreprise aujourd’hui a un département Recherche-Développement . Où est la R&D dans les établissements et dans le système éducatif ? ». Si au niveau ministériel une telle structure existe en France avec la DRDIE, la question du Dr. Wagner est légitime pour ce qu’il en est de la place accordée à la recherche et l’innovation au niveau de chaque école, collège ou lycée. Bien sûr des collègues innovent mais cela se fait trop souvent dans le secret de la classe et sans réflexion commune et une insuffisante mutualisation. L’empowerement est revenu comme une nécessité dans plusieurs interventions.
Les conditions de la créativité sont donc à la fois personnelles, institutionnelles et culturelles.

Comment former les enseignants à la créativité et l'innovation ?
Le titre de la première conférence (Tony Wagner) du WISE était peut-on former et créer des innovateurs ?” Bien sûr on y parlait plus des élèves que des enseignants. Mais la question de leur formation était directement posée dans plusieurs autres moments de ce sommet. Empowering Teachers for Creativity” était ainsi le titre d’une autre table ronde. D’autres ateliers ont aussi abordé cette thématique.
La Compétence 14 du référentiel métier de 2013 en France  définit l’objectif de  «S'engager dans une démarche individuelle et collective de développement professionnel» et insiste sur la nécessité  pour les enseignants de développer des « démarches d'innovation pédagogique visant à l'amélioration des pratiques.» Mais au delà des référentiels officiels qui définissent un enseignant idéal, la question est surtout de voir quels dispositifs peuvent se mettre en place dans une formation initiale et continue favorisant l’innovation et la créativité.
Je m’étais déjà risqué à proposer quelques pistes dans un billet de mars 2014 portant sur l’innovation. Parmi toutes celles évoquées, j’insisterais sur la nécessité d’une approche plus interdisciplinaire. Comme on a pu le voir à travers plusieurs projets présentés lors de ce congrès, la culture de l’innovation et de la créativité passe par l’interdisciplinarité et la capacité à faire des liens entre différents domaines.
Mais l’autre condition majeure c’est l’analyse de pratiques. Le créateur, dans quelque domaine que ce soit, est quelqu’un qui interroge sans cesse sa manière de faire. Alors que rouvre à Paris, le musée qui lui est consacré, souvenons-nous que Picasso, qui est sans doute l’exemple ultime du créateur, a sans arrêt, tout au long de sa vie, questionné sa manière de faire et de créer. « Un tableau était une somme d'additions. Chez moi, un tableau est une somme de destructions.  » avait-il déclaré. Pour être capable de créer, il faut se placer dans une logique de recherche permanente et de doute critique. Et cette compétence là devrait être au coeur de la posture de l’enseignant.



Au terme de ces trois jours, je ne sais pas s’il est déjà le moment de tirer un bilan complet sur cette expérience particulière et ce moment privilégié ( ! ) et hors du temps. Le retour au réel est cependant rapide puisque j’ai retrouvé ce vendredi mes élèves dans mon lycée.
Le premier bilan sera peut-être de se demander si les réflexions issues de ces trois jours auront eu un effet sur ma réflexion et surtout sur ma pratique professionnelle.
Les polémiques sur cet évènement existent et doivent être entendues, j’ai essayé à ma manière d'en tenir compte et d’y répondre dans les précédents billets. Mais, dans celui-ci j’ai surtout tenté de traiter le sujet lui même de ce sommet et de questionner le concept qui a traversé toutes les contributions et d’en voir la pertinence.
En somme de parler de pédagogie, c’est ce qui m’intéresse le plus...!

Philippe Watrelot

 
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