dimanche, mai 07, 2017

Pour l’École, maintenant, on fait quoi ?



La France a choisi la République plutôt que le danger autoritaire, l’ouverture plutôt que le repli sur soi, la tolérance plutôt que la haine, le dialogue plutôt que l’invective. On doit s’en réjouir et souhaiter à Emmanuel Macron et à la société française de parvenir à enrayer les facteurs économiques et sociaux qui conduisent à l’exclusion, le creusement des inégalités et la fracture sociale et qui alimentent le vote extrémiste.
Le nouveau président a semblé prendre la mesure de cet enjeu dans son discours de ce dimanche soir. Mais les chantiers sont immenses.
De cette dynamique nouvelle, on peut placer de l’espoir dans la volonté de dépasser les clivages et les postures et de construire de nouveaux projets communs. Même si on sait bien que les choix à faire nous renvoient à des valeurs et des arbitrages qui doivent être clairs et sans ambigüité.

 Dans le domaine de l’éducation,  les défis sont importants.
Mais il importe tout d’abord à la nouvelle équipe de ne pas oublier ce qui a commencé à être déjà entrepris pour reconstruire une école plus juste et plus efficace. Il faut poursuivre ce travail et l’amplifier parce que la défaillance de l’École à contribuer autant qu’elle le pourrait à répondre à la promesse républicaine et à être réellement démocratique est un des ferments de la défiance à l’égard des institutions et de la montée de l’extrême droite et des intégrismes.
La continuité de l’action est absolument nécessaire dans l’Education nationale. Le temps de l’Éducation n’est pas celui du politique. Il ne s’agit pas de déconstruire ce qui a été fait précédemment mais de s’appuyer dessus pour le poursuivre et l’améliorer.
Rien de pire que la succession des “réformes”. Les enseignants ont besoin de permanence pour continuer à évoluer. Car paradoxalement, pour permettre le changement, il faut s’appuyer sur ce qui se fait déjà. Contrairement à une image trop souvent répandue, le système éducatif n’est pas une institution immobile. L’École publique et ses enseignants sont capables d’expérimentation et d’innovation.  Si on leur donne les moyens et le pouvoir d’agir.

La lutte contre les inégalités doit être au cœur de cette transformation. On ne peut se satisfaire d’une École qui ne fonctionne que pour la moitié de ses élèves.
Au pessimisme de la raison, il faut opposer l’optimisme de l’action. Agir “ici et maintenant” en se saisissant des leviers qui existent, en s’autorisant à innover et à bousculer quelques habitudes et pesanteurs administratives. Plutôt que le risque  de se retrouver confronté dans cinq ans (et même avant) à une explosion sociale et à une école publique menacée, elle, d’implosion.

L’École doit faire sa part dans la transformation indispensable de la société française.
Favoriser une pédagogie plus explicite et différenciée, transformer la gouvernance du système éducatif tout en garantissant la conformité à des objectifs nationaux,  agir sur la formation et en particulier continue, favoriser la coopération et les alliances éducatives, donner plus de pouvoir aux équipes enseignantes pour répondre aux défis. Et surtout ne pas se fier aux  solutions simplistes et médiatiques pour penser la complexité d’une action systémique.
Pour cela, il faudra aussi accepter et favoriser le dialogue social avec les acteurs du changement et les enseignants.
J’ai envie de conclure sur cet optimisme de l’action qui devrait s’exprimer à tous les niveaux. Aussi bien au sommet de l’État que dans l’action de chacun au quotidien. Pour ma part, si j’étais fataliste, si je ne pensais pas que mon action peut faire changer (un peu) les choses, je ne serais pas enseignant !

Philippe Watrelot


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