dimanche, septembre 27, 2015
Bloc-Notes de la semaine du 21 au 27 septembre 2015
- Dictée – Prise de la pastille – Petit con... - .
Le bloc notes de cette semaine s’intéresse encore à la dictée. Le coup de com’ ne passe pas bien auprès des enseignants. Et la presse quant à elle s’intéresse à la diversité des formes que peut prendre le travail sur l’orthographe au delà du mythe nostalgique de la dictée de grand-papa. Dans cette revue de presse on déconstruit aussi l’emballement médiatique sur l’affaire des “pastilles rouges” pour les enfants ne mangeant pas de porc dans une cantine d’Auxerre. Et on s’intérese aussi au cas de Robert Ménard qui a insulté et menacé un enseignant qui refusait de lui serrer la main...
Les fautes de la dictée
La dictée continue à faire des vagues...
On se souvient que lors de la présentation des nouveaux programmes la semaine dernière, la ministre avait choisi d’axer sa communication sur le thème de l’“école de l’exigence” en mettant l’accent sur la dictée quotidienne au primaire. Or, cette injonction ne figure même pas sous cette forme dans les programmes officiels. Mais l’enjeu était pour la Ministre et ses communicants d’allumer un contre-feu en focalisant le débat, les médias et l’opinion sur ce sujet. Au risque d’agacer les enseignants...
Une semaine après c’est toujours la dictée qui fait parler. Et d’abord les enseignants. Dans L’Humanité, Sébastien Sihr résume le sentiment de nombreux enseignants : “C’est un coup de communication ! Après avoir été accusée d’avoir coupé la tête au latin et au grec à l’occasion de la réforme du collège, elle veut donner des gages à une partie de l’opinion publique en lui faisant croire que l’on va, passez-moi l’expression, « tenir la maison » avec des bonnes vieilles recettes d’antan… Il y a une forme de démagogie politicienne sur ce sujet, où l’on fait planer le symbole d’un « âge d’or » de l’école qui n’a, en réalité, jamais existé. ”.
Sur son blog Jean-Michel Zakhartchouk titre son billet “Donnez-nous aujourd’hui notre dictée de chaque jour ? ” et dit à son tour son agacement. Et il rappelle aussi que ce n’est qu’un “exercice d’évaluation avant tout qui permet de vérifier si on orthographie correctement dans une situation bien précise : écrire sous la dictée. Situation d’écriture qui n’est pas la plus fréquente, puisqu’on écrit surtout ce qu’on a dans sa tête, sans qu’il y ait oralisation. Exercice d’évaluation assez curieux où on enlève des points à partir d’un capital de départ et où dans sa forme canonique on parvient rapidement à Zéro, ce qui ne permet pas de noter les formidables progrès de celui qui passe de trente erreurs à quinze, qui ne hiérarchise pas les erreurs ou le fait très mal”
Plusieurs journaux proposent des articles de fond qui s’intéressent à “cette passion française ”comme le titre Le Monde. Ce même journal donne aussi la parole à des internautes (enseignants ou non) . De la quinzaine de témoignages sélectionnés, il ressort une diversité des pratiques en classe. Une inquiétude sur la dictée, facteur d’échec si elle n’est pas bien utilisée, et une attente sociale, forte, en faveur d’une orthographe mieux maîtrisée. Le Figaro évoque, quant à lui, “un mythe et plusieurs réalités” . Car il est vrai qu’au delà de la représentation traditionnelle et mythifiée cet exercice peut prendre aujourd’hui des formes et des finalités très diverses. Pour Louise Tourret, dans Slate.fr “La dictée tranquillise, la dictée fédère. La dictée, c’est le passé dans le présent, l’école immuable et rassurante (surtout quand on ne fait pas soi-même cette dictée, avec une note à la clé). Un invariant scolaire, une expérience commune, un «lieu de mémoire» pour reprendre la typologie chère à l’historien Pierre Nora. Nous avons tous fait des dictées, et quand la ministre en parle, tout le monde comprend, on sait où on va. ” Mais dit-elle l’annonce du retour de “la dictée quotidienne me fait penser à cette marque de Yaourt qui met La Laitière de Vermeer sur des pots qui sortent d’une usine… ”. Car aujourd’hui, rappelle une internaute interrogée par Louise Tourret “il existe des tas de dictées: négociée, frigo, escalier, de mots, de phrases, à trous,... tout est affaire de choix pédago.” On a évoqué aussi dans le dernier bloc-notes , les “twictées”. D’autres enseignants rappelleront que pour apprendre l’orthographe et l’écriture il faut d’abord comprendre qu’elle sert à communiquer et qu’il y aussi les ateliers d’écriture, les correspondances scolaires ou les journaux chers à la pédagogie Freinet (et dont les twictées ne sont qu’un prolongement numérique).
Si la ministre a fait appel aux mythes scolaires pour calmer l’opinion et les éditorialistes, elle a aussi jeté le trouble chez les enseignants. Qui n’avaient pas besoin de cela...
Prise de la Pastille
Une affaire a fait le buzz en cette fin de semaine. Et c’est l’occasion, comme il nous arrive de le faire dans ce bloc-notes, de déconstruire un emballement médiatique.
Un premier article parait sur le site Creusot-Infos et est repris par le site de France3 Bourgogne. On y lit qu’a l’école des Pieds Dalloues, à Auxerre, on avait mis au point un système de collier avec une pastille rouge pour les enfants qui ne mangent pas de porc. Et une pastille jaune pour ceux qui ne mangent pas de viande du tout. L’article initial signale que l’information vient d’une élue municipale d’opposition qui indique “C’est une mère de famille qui m’a interpellé et fait part de son indignation. Des pratiques comme celle-ci ne sont pas acceptables. On n’a pas le droit d’imposer cela, en catimini, à des enfants.” Et elle s’écrie : “C’est révoltant. Cela renvoie à des heures sombres”
Immédiatement, la machine à indignation s’emballe et le “point Godwin” est vite atteint avec évidemment des comparaisons avec l’étoile jaune durant la seconde guerre mondiale. Et c’est d’une certaine façon, logique dans un contexte actuel de forte tension sur la laïcité et en particulier au niveau des cantines. Sur Internet, on va compter de nombreuses réactions, tout comme dans la presse , où l’on se dit révolté par une telle mesure. J’ai moi aussi contribué à cet emballement en diffusant l’information et en disant mon indignation sur les réseaux sociaux. La mairie d’Auxerre a été amenée à très vite publier un communiqué après une enquête interne menée au sein des 11 restaurants et conclut qu'il s'agissait d'une initiative isolée, maladroite, autorégulée. Car il ne s’agit que de quelques enfants de maternelle et de CSP (18 pour être précis) qui ne sont pas encore forcément capables de lire et d'exprimer clairement leurs choix (ou plutôt ceux de leurs parents). Il suffit d’interroger des enseignants travaillant en maternelle pour savoir que les colliers avec des pastilles (ou des clefs) de couleur sont fréquemment utilisés pour pouvoir aller dans un coin jeu ou en bibliothèque ou pour d’autres activités. C’est ce qui a été utilisé, très maladroitement en effet, par de nouvelles surveillantes lors d’un seul repas. Le personnel de la cantine venait de changer et les préférences, allergies et autres spécificités de chacun pas encore connues par tous, indique un article du Figaro très nuancé (eh oui, ça existe...). Le restaurant scolaire fonctionnant en self, les plus grands ont été jugés capables de ne pas se servir de porc s'ils n'en souhaitaient pas et n'ont donc pas reçu de collier. “Il s'agissait de s'assurer que les petits dont les parents ont spécifiquement demandé qu'ils ne mangent pas de porc ne se trompe pas de choix”, indique la mairie d'Auxerre. Celle ci reconnait une «maladresse» dont elle comprend qu'elle puisse «heurter», mais réfute absolument avoir voulu stigmatiser des enfants en fonction de leur appartenance religieuse supposée.
Cette "affaire" ne mérite pas l'emballement médiatique auquel j'ai d'une certaine manière contribué. Nous avons raisonné avec nos références culturelles et historiques d’adultes alors que la décision qui a été prise se situe à hauteur d'enfant et dans des problèmes d'organisation qui sont ceux des enseignants et personnels qui travaillent en maternelle. Il s’agit donc surtout d’une maladresse qui a été instrumentalisée politiquement et médiatiquement.
On attribue à Napoléon l’aphorisme selon lequel “il faut toujours faire l’hypothèse de la bêtise avant celle de la méchanceté”. On peut s’accorder sur le fait que les personnes qui ont pensé à cette solution (même si, au départ, elles n'ont pas pensé à mal), auraient pu envisager les dimensions symboliques de l'affaire. Mais cela ne mérite pas tous les excès auxquels on a assisté depuis la publication de l'information. Tout cela n’aurait pas du se produire si notre beau pays n’était pas si crispé sur des questions identitaires et avec des pyromanes qui jouent sur les peurs et contribuent à un climat de plus en plus rance...
Petit con...
La transition est toute trouvée avec l’information suivante. Robert Ménard aime la provocation mais n’aime pas qu’on lui résiste. Selon le Midi Libre , jeudi 24 septembre, en visite d'école et de cantine dans l'établissement Georges-Sand au Faubourg, Robert Ménard aurait traité un enseignant de "petit con" parce que ce dernier refusait de lui serrer la main. Il aurait ajouté qu'il mériterait une gifle et qu'il ferait déplacer l'enseignant de sa ville. Il a alerté l’inspection d’académie. Sur les réseaux sociaux, le syndicat UNSA éducation a publié une caricature, accompagné du commentaire: "Monsieur Ménard, vous n'êtes pas le bienvenu dans notre école publique". Une phrase qui fait écho aux propos polémiques tenus par le maire de Béziers dans une vidéo, où on le voyait clamer à des réfugiés syriens qu'ils n'étaient "pas les bienvenus".
Samedi après-midi, le rectorat a pris position contre Robert Ménard, selon un article de Metronews et enclenché une “protection juridique du fonctionnaire”. Cela signifie que l’Education nationale assiste le collègue dans ses démarches (notamment pour porter plainte) et se substitue à lui devant les tribunaux si nécessaire. Toujours selon cet article, le cabinet de la ministre de l’Education nationale, est attentif aux évolutions de l'affaire et a lui-même tenu à confirmer la décision du rectorat.
Voilà un beau sujet très concret d’éducation morale et civique... Quelle doit être l’attitude d’un fonctionnaire d’État face à un maire légalement élu mais dont les comportements sont ouvertement racistes ? Doit-on en tant que fonctionnaire respecter l’institution et si oui comment ? Peut-on manifester son désaccord ? Comment résister aux pressions ? Des questions qui risquent de se poser alors que les élections régionales avec tout ses dangers approchent et que certains s’amusent à remettre en question le statut des fonctionnaires...
Bonne Lecture...
Philippe Watrelot
dimanche, septembre 20, 2015
Bloc-Notes de la semaine du 14 au 20 septembre 2015
- Dictée et communication – Que d’histoires ! – Fausses notes – Apprendre à lire - Tableau (noir) ou tablette ?
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Journées du patrimoine : dictée, calcul mental, chronologie, roman national, notes, b-a, BA, tableau noir,...
Cette remarque d’un des co-rédacteurs de la revue de presse, Laurent Fillion, résume bien la tonalité qu’on retrouvera dans ce bloc notes après la présentation des nouveaux programmes et l’amorce d’une nouvelle polémique sur la notation. La capacité de la presse et de l'opinion française à fabriquer des fausses polémiques à partir de la nostalgie d'une École mythifiée et d'informations mal digérées est sidérante...
On peut en voir aussi une illustration avec la manière dont a été lu le rapport de l’OCDE sur le numérique à l’École et l’étude menée sur les méthodes de lecture.
Dictée et communication
Commençons donc ce bloc-notes par la fin de la semaine. Initialement prévue le jeudi 17 en même temps que la grève contre le collège, la remise par le président du Conseil Supérieur des Programmes, Michel Lussault, des projets de nouveaux programmes des cycles 2, 3 et 4 à la Ministre s’est faite vendredi 18 au matin dans les salons du Ministère de l’Éducation. Ces projets sont d’ores et déjà disponibles et téléchargeables sur le site du Ministère . On peut encore parler de “projets”, même s’ils sont présentés comme définitifs, dans la mesure où ils doivent passer par la consultation du CSE et la publication d'un décret qui ne saurait tarder. Car ils doivent être appliqués à la rentrée 2016 en espérant que les éditeurs de manuels seront suffisamment réactifs dans un délai très court (et un peu hors-limite). Chacun pourra se faire son opinion en allant directement à la source. Mais puisque nous nous livrons ici à l’exercice de la revue de presse, intéressons nous surtout à la communication de la ministre et à la manière dont la presse en rend compte.
Les membres du CSP avaient prévu deux niveaux de lecture pour les programmes, avec une partie destinée au grand public et une partie pour les professionnels. Mais ils n'avaient pas anticipé un troisième lectorat, celui des communicants du ministère... Ceux qui ont préparé la présentation qu'allait faire la ministre ont traduit hâtivement certaines préconisations contenues dans les textes : "les activités de lecture et d'écriture sont quotidiennes", "des activités ritualisées" et " [apprendre] à orthographier les mots les plus fréquents" en des formules chocs comme "les élèves feront une dictée chaque jour". Même si c'est un peu dur à avaler, on peut éventuellement comprendre la logique communicationnelle qui consiste à aller dans le sens de ce qu'on croit être l'opinion et les médias pour déminer les polémiques. Et en effet l'avantage de cette interprétation est que les éditorialistes applaudissent quasi-unanimement le retour de la dictée quotidienne. Pensez donc, la dictée, ça parle à tout le monde, ça fait partie du “patrimoine” et nous renvoie tous à l’image d’une école mythifiée...
Marie-Caroline Missir dans L’Express pointe, elle aussi, la manœuvre politique : “Ce qui est en jeu ici, ce n’est pas la dictée, mais l’habillage et la mise en musique de cette réforme. La ministre, qui est bonne élève, n’a pas souhaité reproduire les erreurs commises lors de la présentation de la première mouture de ces programmes au printemps. […] En quelque sorte, cette histoire de dictée n’est rien d’autre que du papier cadeau. Un élément parmi d’autres d’un arsenal de communication. En faire un épouvantail, un cadeau aux réacs c’est faire grand cas d’une recommandation pas si bête, dont chaque enseignant fera bien ce qu’il voudra. ” L’éditorialiste de Libération y voit un “coup marketing habile de la part de la ministre” et Séverin Graveleau dans Le Monde parle, lui, d’un “coup politique”. Dans le Huffington Post, Geoffroy Clavel, évoque “Un exercice de calinothérapie bienvenu à trois mois des élections régionales et au moment où la fronde contre la réforme des collèges reprend du poil de la bête. ”. On peut analyser de la même manière la prudence sur l’évolution de la notation sur laquelle nous reviendrons plus loin
Mais le problème, c’est que cette communication destinée au grand public risque de faire des dégâts chez les enseignants et leurs organisations syndicales. Car, cette affirmation de la nécessité d’une “dictée par jour” peut être interprétée dans un contexte très crispé comme un discrédit sur les pratiques actuelles des enseignants : “Merci, Je n'étais pas au courant que la dictée avait disparu du quotidien des classes” twitte ainsi une enseignante. En plus, les titres de journaux donnent l'image d'une ministre prescriptive (“la ministre veut une dictée par jour"...) et cela laisse penser qu'une ministre décide toute seule de ce que doit faire chaque jour un professeur des écoles dans sa classe. Les propos de la ministre sont globalement ressentis comme une injonction allant à l’encontre de la liberté pédagogique des enseignants. C’est aussi complètement contraire à la logique qui a présidé à la création du CSP supposé être indépendant du pouvoir politique.
Habileté politique ou erreur de communication ? Volonté délibérée de la ministre ou piège tendu par les médias ? C’est, me semble t-il, tout cela à la fois. La communication avait pourtant (bien ?) commencé avec une tribune dans Le Monde où la Ministre s’emploie à tenir les deux bouts de la corde en évoquant à la fois le retour aux “fondamentaux” mais au service d’un socle commun et de la lutte contre les inégalités en parlant d’une “école de l’exigence” qui est un bon slogan pour contrer ceux qui l’accusent de “laxisme” et de “brader les savoirs”. Voici ce qu’on peut lire (entre autres) dans cette tribune : “Rétablir une école de l’exigence a d’abord nécessité des moyens – 60 000 postes, formation initiale et continue des enseignants –, mais aussi un engagement contre le déterminisme social illustré par le renforcement de l’éducation prioritaire et le retour aux cinq matinées de classe. Mais l’enjeu est par nature pédagogique. Dès lors, sans refonte des programmes, sans progressivité repensée des apprentissages, la refondation d’une école de l’exigence sonnerait comme un slogan creux. Le temps est venu de sortir enfin de l’exhortation permanente au « lire, écrire, compter » pour la traduire de façon opérationnelle dans les classes. [...] Pouvions-nous, sciemment, laisser prospérer des programmes qui, trop souvent, construisent les apprentissages sur du sable ? Fallait-il se résigner aux faiblesses en lecture et en calcul mental de trop d’élèves à la fin du collège ? Les nouveaux programmes répondent à ces défis, à la nécessité absolue de donner à tous les élèves, dès les premières années de la scolarité obligatoire, les bases solides qui fonderont leurs connaissances ultérieures, grâce à une refonte globale et cohérente inédite depuis des décennies. Cette cohérence, c’est d’abord celle du parcours de l’élève. Finie, la traditionnelle division par années, et place à une organisation par cycles de trois ans ! […] Cohérence, ensuite, de pratiques pédagogiques organisées autour d’une colonne vertébrale claire : maîtrise des fondamentaux, consolidation des apprentissages, pédagogie de l’entraînement quotidien et de la répétition. […] La cohérence, c’est enfin celle du contenu des programmes eux-mêmes, élaborés comme une déclinaison du socle commun. ”
Oui, mais voilà, cette tribune qui aurait pu s’intituler tout simplement “Pour une École de l’exigence” est titrée (par qui ? Le Monde ? les conseillers ?) : “Najat Vallaud-Belkacem veut « des dictées quotidiennes à l’école »” . Et les autres interventions médiatiques, et notamment sur Europe1 vont marteler le message sur la dictée alors que la formule “dictée quotidienne” n’est pas présente une seule fois au fil des 375 pages des programmes du CSP
A force de vouloir déminer le terrain et éviter une nouvelle polémique, on en vient donc à brouiller le message... Et s’aliéner ou, au mieux désorienter, ceux qui sont pourtant de potentiels soutiens sans forcément séduire les opposants. Il faudra bien clarifier à un moment ou un autre et selon la formule du cardinal de Retz : “On ne sort de l’ambigüité qu’à ses dépens…” Reste à savoir si la lecture attentive et approfondie des programmes réconfortera les enseignants...
Les programmes : quelle histoire !
Pas sûr, et pas sur tous les sujets...
La question de la “dictée quotidienne” suscite déjà des réactions. Éveline Charmeux sur son blog pose la question “Une dictée par jour pour écrire sans erreurs ? Et si l'on apprenait plutôt l'orthographe ?” et nous rappelle que la dictée est une évaluation et pas, à proprement parler, un apprentissage. Mais qui répétons le, cette injonction à la dictée quotidienne n’est pas écrite dans les programmes...
En revanche, ce qui figure dans le texte du CSP, ce sont les programmes d’histoire. Cette matière a toujours eu une place à part dans le débat sur l’École. L’Histoire, tout comme la dictée, ça fait partie du patrimoine (et ça le construit)... On se souvient qu’en avril-mai, la première version des programmes avait fait l’objet de nombreuses critiques de la part d’intellectuels médiatiques et des politiques alors qu’ils avaient été plutôt bien accueillis par une bonne partie de la profession y compris au sein même du SNES. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Un article de Libération interroge des enseignants d’Histoire-Géographie sur leur réaction à la publication des nouveaux programmes d’histoire. Parmi eux, on peut lire celle de Laurence de Cock, animatrice du collectif Aggiornamento qui s’est aussi exprimée sur le site de l’association .Elle reproche plusieurs reculs aux programme présentés par le CSP : “Le premier recul, le plus triste, c’est que les programmes présentés vendredi matin abandonnent l’idée d’offrir une véritable liberté pédagogique aux professeurs. Dans la précédente version de la réforme, à l’intérieur d’un grand thème obligatoire, un enseignant pouvait composer son cours entre différentes déclinaisons proposées. Cela lui permettait de s’adapter à la singularité de sa classe, aux crispations ou aux attentes de ses élèves : passer plus de temps sur l’histoire ouvrière dans un collège d’un ancien bassin minier, par exemple. Cette liberté de choix, qui aurait profondément fait évoluer le métier, est aujourd’hui totalement supprimée. ”. Le deuxième recul qu’elle reproche au CSP est d’avoir “trop cédé aux critiques les plus réactionnaires, qui s’alarmaient de la «disparition» de la chronologie ou de la place, selon eux, trop réduite faite à l’histoire de France.”. Et elle conclut “ Il y avait l’opportunité dans les premiers projets de professionnaliser les programmes en les déconnectant du politique mais les échéances électorales semblent nous avoir rattrapés.»”
Les programmes d’histoire semblent donc avoir fait les frais. Mais pour faire bonne mesure, donnons aussi la parole à Michel Lussault le président du CSP. Celui-ci est interviewé par le JDD.fr. Il répond aux critiques : “Nous nous sommes aperçus que le choix laissé aux professeurs (d’enseigner ou non certains sujets) n’était pas compris, nous sommes donc revenus à des thèmes obligatoires… tout en insistant sur la liberté pédagogique. Certains ont cru que l’Europe des Lumières allait disparaître ; nous prenons soin de montrer qu’il n’en est rien. De même, nous n’avons jamais eu l’intention d’occulter l’histoire de la chrétienté. Nous avons réécrit les textes pour que ce soit très clair. Les élèves étudieront la naissance et l’expansion de l’Islam en 5e, après avoir découvert le judaïsme et la naissance du christianisme en 6e. Et l’on insistera en 5e sur les liens entre les empires byzantin et carolingien avec le califat. Ceux qui continueront à polémiquer sont ceux qui ne supportent pas de voir écrit le mot Islam dans un programme d’histoire. ”. Il n’y a pas que l’Histoire ! Dans cet entretien, Michel Lussault apporte aussi des précisions sur les autres programmes qui ont, eux aussi, fait l’objet de quelques critiques même s’ils n’ont pas eu la même exposition médiatique.
Fausses notes
Concours de titres idiots dans la presse à propos de la notation...
“Les élèves ne pourront peut-être plus décrocher la note de 20/20” (journal des femmes), “Ecole : la note sur 20 bientôt aux oubliettes ?” (Europe 1). Chez les éditorialistes aussi on se mobilise pour la défense du zéro érigé au rang de monument national... "On notera de 1 à 5, le zéro, cette grande invention babylonienne, étant supprimé, car, nous dit-on, le pire élève sait tout de même quelque chose. On croit rêver...", se désole Michel Bassi dans L'Eclair des Pyrénées. "Certes, il est louable de faire en sorte que l'élève ne s’ennuie pas à l'école, ou qu'il ne se sente pas traumatisé par une mauvaise note, mais de là à interdire le 0, on confine au ridicule", ajoute Sébastien Lacroix dans L'Union.
On est toujours étonné de la manière dont on peut fabriquer des fausses polémiques à partir de la nostalgie d'une École mythifiée et d'informations mal lues...
C’est Europe 1 qui a remis sur le tapis cette semaine la sempiternelle question de l’évaluation à l’école. Selon la radio,. “les notes sur 20 devraient disparaître pour laisser la place à une notation de 1 à 4 ou de 1 à 5. Ce projet serait “dans les cartons du ministère et devrait être voté “dans les jours qui viennent par le Conseil supérieur de l’Education”. Les autres journaux embrayent dont Le Figaro. Libération s’en amuse et cite la réaction immédiate du cabinet de la Ministre, visiblement très attentif ces jours-ci à éteindre tout début de polémique : “Nous démentons cette information. L’échelle évoquée par Europe1 est une réflexion menée sur le suivi du socle commun de connaissances et ne correspond absolument pas aux notes dans les disciplines.” En revanche, confirme le cabinet, “des changements dans l’évaluation” sont bien en préparation et “seront présentés dans quelques semaines.”. Ce que confirme aussi Le Monde en titrant : “La notation de 0 à 20 ne sera pas supprimée… du moins pas tout de suite”. Mais alors, d’où vient cette agitation ? C’est Le Parisien qui donne des précisions en apportant deux informations relatives à la réforme du brevet et au "nouveau relevé de notes". En ce qui concerne le premier, il comprendrait deux épreuves écrites et une épreuve orale, notées chacune sur 10 et "mélangeant plusieurs disciplines". La maîtrise du socle commun serait évaluée avec huit notes de 1 à 4 ou 1 à 5. L'actuel contrôle continu serait abandonné. Quant au bulletin trimestriel, il comprendrait 3 ou 4 pages, avec des notes (éventuellement sur 20) par discipline, une indication sur la partie du programme étudiée durant le trimestre, une indication sur "la dynamique de progrès" et, facultativement, une indication de moyenne. Sur la page deux, une évaluation sans note des EPI (enseignements pratiques interdisciplinaires), sur la page 3 un commentaire global. Au dernier trimestre de 6ème et de 3ème, donc en fin de cycles, une page serait consacrée à la "maîtrise des domaines et composantes du socle", avec 8 items évalués avec 4 ou 5 niveaux.
Mais, en fait, dans ses commentaires, le quotidien semble mélanger la notation disciplinaire et l'évaluation du socle. Ce que confirme donc le communiqué du ministère de l’éducation déjà cité : “L’échelle évoquée par Europe 1 est une réflexion menée sur le suivi du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, et ne correspond absolument pas aux notes dans les disciplines ”.
Une réforme des notes ? Mais pourquoi faire ??? Alors que le monde entier nous envie, au même titre que le camembert et la haute couture, la bonne vieille note sur 20, héritée des jésuites et des mandarins ? Ces chiffres, ça fait sérieux, on peut même noter au demi-point voire au quart de point ! C’est scientifique et irréfutable. Mais, mais... on me dit que les travaux de la docimologie depuis les années 30 ont montré la variabilité de la note et tous les biais qui l’accompagnent. Et, on me dit aussi que bien d’autres pays n’utilisent pas la note sur 20 ! Les allemands ou les suisses avec leurs notes sur 6 ou les anglais avec huit niveaux, les suédois avec quatre niveaux... Mais comment font-ils ? Le génie français n’est pas reconnu !
Lecture
Sylllabique vs Globale... Les méthodes de lecture, voilà un autre incontournable des bonnes vieilles polémiques “à la française”. Ça fait plus de quarante ans que ça dure...
Mais la publication cette semaine d’une enquête sur les pratiques de l’enseignement de la lecture et de l’écriture au cours préparatoire vient apporter de la nuance et de la complexité là où on se complait dans les débats caricaturaux et binaires.
Décrire, avec le plus de finesse possible, l’ordinaire du travail des classes et les caractéristiques de celles dans lesquelles les élèves progressent le plus" de façon à "éteindre la guerre des méthodes" de lecture, tel est l'objectif que se sont fixé Roland Goigoux et les chercheurs qui ont travaillé sur le programme "Lire et écrire, efficacité des pratiques d'enseignement de la lecture et de l'écriture au cours préparatoire" et dont les premiers résultats viennent d'être donnés à la presse (lire notamment un long article dans Le Monde ). L’originalité de l’étude est qu’elle s’appuie sur les pratiques réelles des enseignants dans les classes (131 enseignants et 2507 élèves testés pendant trois ans) et non sur l’expérimentation d’une méthode. Et les premiers résultats ne semblent pas privilégier une méthode d’apprentissage en particulier. Selon cette étude, il n’existe ni recette magique, ni profil-type de bon professeur, ni manuel idéal, mais une alchimie qui peut varier selon les enseignants.
“Cela relativise le débat sur les méthodes” conclut Roland Goigoux et il est vrai que nous sommes bien loin de la veille opposition stérile et obsolète entre “syllabique” et “globale” qui fait encore trop souvent les choux gras de la presse et quelquefois des hommes politiques encore aujourd’hui. Car, dans le quotidien des classes, on semble très loin de ces“querelles de chapelle” comme le disent des enseignants interrogés par Le Monde . Et si on faisait confiance à l’expertise des enseignants et si les médias allaient un peu plus les écouter comme le fait cet article au lieu d’agiter de vieilles querelles et d’alimenter ainsi les inquiétudes des parents ?
Tableau (noir) ou tablette ?
Puisque la thématique de cette revue de presse est autour du patrimoine, finissons la avec un autre incontournable du patrimoine scolaire : le tableau noir. À la lecture d’un rapport sorti cette semaine, on a pu croire à son retour en force au détriment des tablettes et autres outils numériques.
C’est en effet l’OCDE qui a publié le 15 septembre un rapport intitulé “Students, Computers and Learning: Making The Connection”. Cette étude indique que même les pays qui ont considérablement investi dans les technologies de l’information et de la communication dans l’éducation n’ont enregistré aucune amélioration notable de leurs résultats aux évaluations PISA de compréhension de l’écrit, de mathématiques et de sciences. L'utilisation massive d'ordinateurs n'augmenterait ni les résultats individuels, ni les résultats collectifs, quels que soit l'âge, le niveau d'études et l'argent dépensé à former les enseignants dit cette étude. Toutefois, sur ce plan, comme le souligne Les Échos la France s'en sort mieux que d’autres . “ Mieux que d'autres pays”, commente Eric Charbonnier, expert à l'OCDE en charge de l'éducation. Et ce, ajoute-t-il, “alors même que le numérique en France ne fait pas partie des apprentissages”.
Ce que dit cette étude, en substance, c’est que le numérique n’est en tout cas, pas une solution miracle. Comme le souligne Emmanuel Davidenkoff, attendre du numérique qu'il améliore, en tant que tel, les apprentissages, relève pour l'heure de la pensée magique. Et il est alors tentant d’en conclure, comme le font certains éditorialistes et d’adversaires du numérique après une lecture rapide (globale ?) du rapport, que rien ne vaut le bon vieux tableau noir et les “bonnes vieilles” méthodes.
Pour aller plus loin que ces fausses évidences, il faut rentrer dans le détail du rapport comme l’a fait Bruno Devauchelle dans le Café Pédagogique “En lisant plus avant ce document, écrit-il, il apparaît surtout que le numérique et l'école ne peuvent pas s'entendre tant que l'école reste telle qu'elle est. Car finalement ce que l'on observe c'est que la scolarisation dans sa forme actuelle est incapable de résoudre nombre de problèmes d'inégalité et que l'envahissement du scolaire par le numérique ne résout aucun problème dans ce domaine et qu'au contraire des pratiques trop envahissantes pourraient se faire au détriment des apprentissages scolaires de base. Ce propos va alimenter au premier niveau les opposants au numérique en milieu scolaire. Mais il est une lecture au deuxième niveau qui doit faire réfléchir : la conclusion du résumé est percutante : "In the end, technology can amplify great teaching, but great technology cannot replace poor teaching." En d'autres termes, introduire le numérique ne permet pas de remédier à un enseignement scolaire médiocre ou pauvre. Et c'est là qu'il y a un nœud important.”
Les technologies de l’information et de la communication ont changé notre vie quotidienne. On peut penser que ces innovations vont aussi changer l’École et les manières d’apprendre. Les technologies numériques ont en effet des potentialités énormes. Ils donnent accès à des informations et des connaissances illimitées (reste à les transformer en savoirs…). Ces outils peuvent agir aussi sur la motivation des élèves, leur concentration, leur participation en classe. Ce sont aussi potentiellement des outils de lutte contre l'ennui à l'école et au final contre l'échec scolaire. Et c’est ce qui explique que les “décideurs” aiment à prendre la pose devant des salles informatiques toutes neuves ou des enfants équipés de tablettes dernier cri. Mais il faut se garder d’une illusion d’optique. Celle de croire qu’à lui seul un outil, aussi performant soit-il, va révolutionner l’enseignement. Certes, le numérique est au cœur d’une révolution de la production et de la consommation dans tous les domaines et il modifie considérablement la manière dont circule l’information et notre rapport aux connaissances. Mais comme je l’ai déjà écrit , pour l'enseignement cette transformation passe d’abord par une réflexion sur les usages et donc une formation. Ce n’est pas la technologie qui, dans l’école, est intrinsèquement innovante, c’est la réflexion pédagogique qui l’accompagne.
On peut même faire des dictées avec Twitter !
Bonne Lecture...
Philippe Watrelot
dimanche, septembre 13, 2015
Bloc-Notes de la semaine du 7 au 13 septembre 2015
- Semaine cruciale - Université - Formation -
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Le bloc notes qui a plutôt pour habitude de revenir sur les jours qui viennent de s’écouler commence d’abord par évoquer la semaine prochaine et qui s’annonce déterminante. On va en effet voir se télescoper deux évènements : la grève contre le collège 2016 et la publication des nouveaux programmes. La semaine écoulée a été marquée par la publication de plusieurs rapports ou notes qui suscitent du débat. On s’attardera sur le rapport «Pour une société apprenante» qui trace des perspectives pour l’Université et comporte des propositions choc. Et on reviendra aussi sur la note Terra Nova à propos de la formation dans l’Éducation Nationale. Même s’il est difficile d’être à la fois acteur et commentateur…
Semaine cruciale
Sans vouloir jouer les “Philippulus le prophète” , la semaine qui vient est cruciale. On risque, en tout cas, d’y parler beaucoup d’éducation. Plusieurs évènements vont se télescoper. En premier lieu, le jeudi 17 septembre aura lieu la grève des opposants à la réforme du collège . Ceux-ci espèrent évidemment, construire un nouveau rapport de forces après la grève du 11 juin qui avait peu mobilisé. Il est prévu aussi une journée de manifestation nationale en octobre. Marie-Caroline Missir dans L’Express évoque un sondage confidentiel commandé cet été par le Service d’Information générale du gouvernement (le « SIG » chargé d’observer l’humeur des Français et d’appuyer la communication ministérielle), qui montrerait que les trois quart des Français auraient une opinion défavorable de la réforme du collège. Selon la journaliste “Les sondés ont ainsi repris à leur compte l’argumentaire déployé par les opposants à la réforme, qui a plus « imprimé » que celui du ministère. L’échec est bien dans une bataille de communication qui a joué en faveur des anti-réforme. ”.
Mais la bataille est-elle perdue ? Plusieurs articles (dans L’Express ou le Café Pédagogique ) décrivent la “contre-attaque” et la “mobilisation générale” (pourquoi un tel vocabulaire guerrier chez les journalistes ?). Ce dispositif est exposé dans un document remis aux recteurs lors de leur réunion de rentrée, en Sorbonne, le 24 août dernier. « Il s’agit à la fois de diffuser les fondamentaux de la réforme (sens et opérationnalisation), de constituer un réseau de cadres et de formateurs à même d’assurer le déploiement en académie, de faire l’état des besoins en terme d’accompagnement et de production de ressources. » dit ce document. La directrice générale de l’enseignement scolaire, Florence Robine, se déplacera dans toutes les académies pour expliciter auprès des cadres et des formateurs eux-mêmes les enjeux de cette réforme. Dans chaque académie, un « groupe d’appui » sera constitué avec des chefs d’établissement et des profs ayant participé aux groupes de travail qui ont préfiguré la réforme. Mais l’essentiel de ce dispositif réside dans un plan important de formation que détaille un article du Café Pédagogique en citant le dossier de presse du ministère : " chaque enseignant bénéficiera de huit journées de formation organisées selon une logique de proximité de façon à réduire les temps de déplacement et à renforcer la cohérence de l’action au niveau local... Les regroupements pourront se dérouler dans le cadre des bassins de formation, des districts, des réseaux d’établissements ou au sein des EPLE" et plus loin il est précisé “Pour répondre à cette exigence, les équipes au sein d’un établissement seront formées par vagues successives”
Le Café Pédagogique aime créer la polémique et pose la question d’une formation se situant la "zone grise" des obligations de service en dehors des heures de cours. Interrogé par le Café pédagogique, le ministère précise que "la formation doit s'effectuer dans le temps de travail défini par les 1607 heures annuelles. L'objectif est bien d'éviter de toucher aux heures de cours même si des contraintes organisationnelles peuvent conduire à des absences ponctuelles. La formation n'est donc pas en plus des 1607 heures et ne donnent donc pas lieu à rémunération pendant les 36 semaines de cours. Par contre les formations durant les congés pour des volontaires donnera lieu à rémunération". On voit donc un nouveau front s’ouvrir, procédurier celui-là : peut-on contraindre les enseignants à se former alors que les obligations de service malgré les négociations récentes sont encore ambigües sur ce point ?
La sortie par le haut de cette situation qui rajoute des motifs de conflits passe donc par un travail de conviction et d’explication et se situe au niveau des établissements et de la capacité des personnels de direction et des équipes à construire ensemble des formations s’appuyant sur les expériences de terrain et la réflexion collective. Pas simple...
L’autre évènement qui va marquer la semaine prochaine, c’est la publication des nouveaux programmes. Dans Le Monde on apprend que le Conseil supérieur des programmes (CSP) prévoit de rendre sa copie “la semaine du 17 septembre”. Et l’article ajoute “Au risque de revivre un « télescopage » avec la réforme du collège qui avait déjà enflammé les débats – et brouillé les esprits – au printemps : c’est aussi le 17 septembre qu’une intersyndicale a appelé à la grève.”. Toujours d’aprèsLe Monde, un “double niveau de lecture” devrait rendre ces programmes plus simples à s’approprier par le grand public, avec un récapitulatif, discipline par discipline, des compétences travaillées par les élèves. Une écriture “ claire, sans jargon” promet-on. On annonce donc des “inflexions” mais le risque d’une dénaturation du projet initial, et notamment en Histoire, n’est pas à exclure.
Décidemment le collège 2016 occupe déjà tous les esprits dans cette rentrée 2015.
Université
La semaine a été marquée par la publication de plusieurs rapports ou notes qui suscitent du débat.
C’est d’abord le rapport «Pour une société apprenante» rendu mardi 8 septembre au président de la République, par le comité pour la Stratégie nationale de l’enseignement supérieur (StraNES). Comme le résume un article du Monde, il s’agit d’une stratégie à dix ans pour remodeler l’université qui est proposée par les rédacteurs, les universitaires Bertrand Monthubert et Sophie Béjean. La StraNES propose ainsi d’accroître le niveau général de qualification des Français en se fixant à un horizon de 10 ans un objectif de 60% d'une classe d'âge diplômée de l’Enseignement supérieur. Pour servir cette ambition, la StraNES place la lutte contre les inégalités sociales dans l’accès aux diplômes, la Formation tout au long de la vie (FTLV) et la transition digitale au cœur de ses propositions. Le document formule 40 propositions rassemblées autour de 5 axes stratégiques. Dès cet automne, le rapport devrait être débattu au Parlement tandis que les premières mesures destinées à sa mise en œuvre seront prises par Najat Vallaud-Belkacem et Thierry Mandon.
Ces quarante propositions balayent tous les sujets. Parmi d’autres points, on y aborde la question du numérique. On peut y lire ceci : “Cela fait maintenant plusieurs décennies qu’on autorise les calculatrices dans les examens ; l’étape suivante est d’autoriser – comme au Danemark par exemple – les ordinateurs avec accès total à Internet. Cette étape est inéluctable, anticipons-la afin de permettre le déploiement d’une formation adaptée au monde qui nous entoure ” . Plus concrètement, cela signifie que les professeurs seraient amenés dans les examens, à faire jouer “la capacité [de leurs étudiants] à savoir trouver l’information pertinente, à la comprendre pour la réinvestir dans une production personnelle ou collective ”.
Si cette proposition risque de faire parler non seulement à l’université mais aussi dans les lycées, il en est une autre qui est potentiellement la source non seulement de vifs débats mais même de mobilisations lycéennes et étudiantes. En effet, le rapport fait la proposition de ne plus accorder un accès automatique à l'université pour les bacheliers professionnels et technologiques. Précisément il suggère de “ permettre l'accès de droit aux licences générales aux bacheliers titulaires d'un baccalauréat général ”. Pour les filières professionnelles et technologiques, “un examen du dossier des bacheliers ” est prévu. “Il débouchera sur un avis favorable, réservé ou défavorable.” Dans tous les cas, poursuit le rapport, “une place dans une des filières publiques de l'enseignement supérieur sera proposée à l'issue d'un conseil d'orientation postsecondaire, en proposant si nécessaire le passage par une passerelle et/ou un parcours adapté ”. Il s’agit donc d’une gestion des flux et la mise en place d’une politique d’orientation en actant le fait qu’une bonne partie (mais pas toute) de l’échec en licence provient des étudiants issus des bacs pro ou techno.
Mais cette proposition revient alors sur un des fondements du système français pour qui le baccalauréat est depuis sa création, le premier grade universitaire. Ce qui fait qu’il n’y a pas formellement de sélection à l’entrée. Or, qu'on le veuille ou non les Bacs Techno et Pro sont des diplômes de l'enseignement supérieur au même titre que le Bac Général. La meilleure preuve c'est que ces bacs sont bien comptabilisés pour le calcul annuel du taux de réussite au bac. Cette proposition signifie donc que tous les bacs n’ont pas la même “valeur faciale” et n’ouvrent pas le mêmes portes.
On pourra dire qu’il ne s’agit ici que de mettre fin à l’hypocrisie d’un système qui conduit un grand nombre de bacheliers à l’échec et dénoncé par les enseignants du supérieur qui enseignent au niveau licence. Mais il faut alors rappeler que l’hypocrisie va plus loin car les titulaires des bacs techno et pro n'ont pas tous accès aux BTS qui leur sont en principe réservés à cause des bacheliers généraux qui prennent les places et du mode de sélection de ces formations. Le débat est aussi pédagogique pourront également dire certains. Car comme dans le 2d degré, le niveau insuffisant des étudiants est aussi un problème pédagogique et pas une fatalité qu’on règlerait par une mesure de gestion des flux. Et les universités, même si certaines commencent à le faire, devraient vraiment s’y atteler. Et si la pédagogie n’était plus un gros mot à l’université ?
Quoi qu’il en soit, on voit bien ce que cette proposition a potentiellement de quoi mettre dans la rue des milliers de lycéens et d’étudiants. Et selon une citation attribuée à un conseiller ministériel il y a une trentaine d’années “les lycéens c’est comme le dentifrice, c’est plus facile de les faire sortir que de les faire rentrer...”
Formation
L’autre rapport qui a fait un peu de bruit cette semaine, est une note de la fondation Terra Nova sur “Le recrutement et la formation des personnels de l’Education nationale”. En parler est un peu compliqué puisque j’en suis un des co-auteurs. Dans une interview, j’explique les raisons pour lesquelles je me suis engagé à titre personnel dans cette réflexion et je précise quelques convictions. J’y redis aussi ce que j’ai déjà exprimé à plusieurs reprises dans ce bloc notes. Dans notre beau pays qui aime les débats binaires et clivants, “on est coincés entre deux chaises. D’un côté, la critique systématique et le refus de toute modification du système, de l’autre, la “pensée magique” et un discours qui consiste à assurer que finalement tout ira bien si on le dit. ” Or, pour faire bouger les choses, “ il faut absolument sortir de l’incantation et des discours performatifs et entendre les critiques et les suggestions d’amélioration.”. Si la note est présentée comme une “critique sévère” de la formation, elle se veut avant tout une critique constructive.
On trouvera plusieurs résumés des propositions de ce groupe de travail. Dans ÉducPros, ou bien encore La Croix ou sur le site d’information Touteduc . La note dans son intégralité est téléchargeable sur le site de la fondation. La proposition souvent mise en avant est celle de modifier la place du concours en plaçant l’admissibilité en fin de M1 et l’admission en fin de M2 avec des épreuves en situation professionnelle. On insiste aussi sur la nécessité de donner un statut plus stable et autonome aux ESPÉ. Mais d’autres propositions méritent l’attention et devraient susciter le débat. . En particulier la note de Terra Nova défend l’instauration d’un droit et d’une obligation de se former pour les enseignants. Arguant qu’il s’agit d’ "une nécessité qui ne peut être laissée au seul volontariat des individus", le groupe des rédacteurs évoque une double obligation : pour l’Etat à travers l’attribution à chaque enseignant d’un crédit de formation rechargeable ; pour les enseignants, "par exemple sous la forme d’une à trois semaines de formation chacune des trois premières années d’exercice puis par période de trois ans". Et "pour éviter la désorganisation de l’enseignement", la formation continue pourrait se faire "d’une part en dehors du temps de service devant les élèves et de l’autre en mettant en place des dispositifs de remplacement organisés localement pour les formations de courte durée et par les services académiques pour les stages longs". On voit que cette proposition rentre en résonance avec la possible polémique évoquée plus haut à propos des formations pour le collège 2016. Mais elle réaffirme surtout ce qui devrait être une évidence : “enseigner est un métier qui s’apprend... tout le temps !”
Bonne Lecture...
Philippe Watrelot
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samedi, septembre 05, 2015
Bloc-Notes de la semaine du 31 aout au 6 septembre 2015
- 60 000 – Rude est l’école – une photo -
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Le bloc notes de cette semaine de rentrée revient sur la “bataille des 60 000”. Il s’agit bien sûr de la polémique initiée par Jean-Luc Mélenchon qualifiant de menteurs le président de la République et sa ministre de l’Éducation à propos de la promesse de créer soixante mille postes à la fin du quinquennat. Najat Vallaud Belkacem a répondu vivement à cette accusation et plusieurs journaux ont sorti leurs machines à calculer pour démêler le vrai du faux. On s’intéressera aussi à l’expérience vécue par une journaliste devenue prof vacataire pendant quelques mois. Et on évoquera le sort des réfugiés à partir de la photo qui a bouleversé l’opinion et le droit à l’éducation pour tous.
60 000
“Éducation : la bataille des « 60 000 » fait rage ” titre Le Point . De nombreux journaux et magazines font aussi leur titre sur ce thème.
Tout part d’une intervention et d’un tweet de Jean-Luc Mélenchon le 30 aout dernier à l’occasion de l’université d’été du Parti de gauche. À la tribune, il a accusé le gouvernement de « mensonge » et « d’enfumage » sur le nombre de postes dans l’Education nationale. “François Hollande avait promis 60.000 créations de postes” mais “il n’y en a que 4.000 à peine, tout le reste ce sont des stagiaires qui ont été recrutés, et ils ne passent qu’un tiers de leurs temps devant les élèves”, a-t-il dit en marge de son discours. Quant au tweet, peu propice à la nuance, il n’est pas exempt de répétitions avec : “ Menteur F.Hollande ! Menteuse N.Vallaud-Belkacem ! Vous n'avez pas créé 60 000 postes dans l'Education nationale ! Menteurs ! Menteurs ! ”
En réponse, sur France Inter le lundi 31 aout , la ministre de l’éducation nationale, de son côté, a brandi des chiffres autrement plus élevés. “Je suis formelle, ce sont 35 200 postes qui ont été créés” a-t-elle assuré . Et le lendemain, jour de rentrée scolaire lors d’un déplacement à Pouilly sur Serre (Aisne) , c’est le président de la République qui a réaffirmé : “Il y aura bien 60.000 postes créés dans l'éducation d'ici 2017»”
En dehors de l’article du Point précité, quelques articles tentent de donner des clés pour comprendre cette “bataille des 60 000”. C’est le cas d’un article de La Croix ou encore un article de Libération .
Un petit rappel avant toute chose... Pour ma part, lorsque j’évoque ce sujet je parle toujours (ou presque) de “RE-créations de postes”. Car il ne faut pas oublier que c’est près de 80 000 postes qui ont été supprimés sous le quinquennat Sarkozy. La promesse du candidat Hollande (qui n’était pas sans visée électoraliste) a surpris son équipe de campagne mais se situe bien dans ce contexte d’affirmation d’une priorité à l’éducation. Et le président sera jugé, entre autres, sur cette promesse emblématique de son quinquennat.
Alors qu'en est-il ? Notons, d'abord, que sur les « 60 000 » postes annoncés par le président et précisés ensuite, seuls 54 000 reviennent à l'Éducation nationale, les autres étant dévolus à l'Enseignement supérieur et aux lycées agricoles. Sur ces 54 000, 48 000 sont des postes de professeur, les 6 000 autres étant ceux de personnel non enseignant (CPE, principaux, etc.). Sur cet objectif, le ministère affiche à des chiffres prometteurs : 31 600 postes déjà créés dans l'Éducation nationale qui se décomposeraient ainsi : 21 500 postes de stagiaires (sur un total attendu à l'horizon 2017 de 27 000), 4 150 postes d'enseignant titulaire (sur 21 000 attendus) et 3 150 autres postes (sur 6000).
En dehors des effets de tribune de JL Mélenchon, la critique porte sur deux points. En premier lieu, les stagiaires (dont la formation en alternance a été rétablie après sa suppression par Nicolas Sarkozy) n’enseignent qu’à mi-temps. Ensuite parce, selon certains (cf. un article de BuzzFeed) , tous les postes “créés” ne sont pas pourvus car on manquerait de candidats dans plusieurs concours. D’autres encore, mettent en avant la pression démographique (le baby boom de l’an 2000) qui réduirait les effets des créations de postes.
A noter que sur cette polémique, les réactions syndicales sont diverses, y compris au sein de la même fédération. Ainsi pour le SNES-FSU “on ne va pas y arriver, estime la co-secrétaire générale Frédérique Rolet. Il y a 8.500 emplois nouveaux prévus au projet de budget 2016. Il en faudrait au moins 11.000 pour réaliser la promesse des plus de 22.000 qui restent à créer.». Alors que la secrétaire générale de la FSU, Bernadette Groison, dans une interview au journal Les Échos se démarque nettement de la position de JL Mélenchon en affirmant “Nous ne faisons pas le même calcul. Pour la FSU, plus de la moitié des postes promis ont été créés. On demande donc au gouvernement de mettre un coup de booster pour tenir l’engagement d’ici à 2017. ”. Le SE-UNSA, n’est pas aussi alarmiste, mais fait part de ses craintes sur la scolarisation des moins de trois ans : “ seul un tiers des 3.000 postes envisagé d’ici à 2017 a été créé.
Sans être en aucune manière un “expert” de ces questions (mais dans le domaine éducatif, on sait bien que ce statut n’est pas nécessaire pour s’exprimer !), cela m’inspire quelques remarques :
- Il y a eu un problème de com' : création “nettes” ou "brutes” ? Par définition, les créations de postes nettes seraient des postes budgétaires ETP (équivalent temps plein) supérieurs aux départs en retraite. Les suppressions, au contraire, s'effectuent par le non-remplacement de tous les départs en retraite. Autrement dit : est-ce que les créations de postes promises ne serviront qu'à compenser l'augmentation démographique des élèves d'une part et les départs en retraite des profs d'autre part ? C'est pas net...
- Recrutement ou créations ? il faut en effet tenir compte des postes non pourvus par faute de candidats ou parce que ceux qui se présentent ne sont pas tous à la hauteur. Il y a bien sûr à travailler sur l’attractivité du métier mais celle ci ne se réduit pas au seul salaire . Et, sans vouloir me faire l'avocat de qui que ce soit, au delà de la responsabilité du gouvernement il faut aussi questionner celle des jurys de concours qui ne pourvoient pas tous les postes et peuvent être quelquefois très malthusiens.
- La promesse des 60 000 postes a été absorbée pour près de la moitié par le rétablissement de la formation en alternance des enseignants stagiaires (moitié du temps en classe, l'autre à l'ESPÉ, donc 2 stagiaires = un équivalent temps plein). Mais une fois fini leur stage, ils deviennent profs à temps plein ! Donc ceux qui ne les comptent que pour moitié (et a fortiori pour un tiers) font des calculs à court terme et un peu biaisés...
- Pour compliquer la chose, il faut rajouter que la gestion des postes budgétaires (les enseignants putatifs) s'effectue en année civile avec le budget de l'État et la gestion des enseignants réels se fait en année scolaire. Le calcul s’en ressent selon qu'on se place en année civile ou en année scolaire.
- Vu le nombre d'établissements du primaire et de collège, 60 000 postes c'est même pas un poste de plus par établissement. Il est alors difficile pour la majeure partie des collègues de croire à ces créations... Il ne faut pas l'oublier.
- Il ne faut pas oublier non plus que si on se place sur un plan strictement mécanique, il suffirait de réduire d’une heure par semaine l'emploi du temps de toutes les classes de lycée et de collège pour dégager plus de 10 000 postes....
Rien n’est simple...
Rude est l’école...
L’an dernier, de février à juin, la journaliste Louise Tourret qui anime l’émission Rue des Écoles sur France Culture (cette année le dimanche de 17h à 19h) a assuré des cours de Français dans un collège REP+ de Paris comme vacataire.
Comme elle l’écrit dans son premier article d’une série consacrée à cette expérience : “Devenir prof? Rien de plus simple (c'est après que ça se complique) ”. L’Éducation Nationale use et abuse des emplois précaires et il est relativement aisé de se faire recruter comme “vacataire”. Dans une série d’articles, elle raconte la solitude de l’enseignant et constate que même si certains collègues l’aident “ la porte de la classe se refermera à chaque début de cours pour une heure de solitude. ” et elle ajoute “ Je réaliserai aussi rapidement qu’il est assez déplacé d’arriver en salle des profs et de déclarer que je galère. Ce serait comme d’arriver avec une pancarte «Je suis une mauvaise prof»! Je me demande combien de petits nouveaux, ou même pas forcément, galèrent en silence sans recours.”. Elle évoque aussi dans un autre billet intitulé “La difficulté scolaire n’est pas une maladie contagieuse ”, les problèmes d’apprentissage des élèves mais aussi les moyens qu’elle utilise pour les contourner. Dans un troisième billet (en attendant le quatrième ?), en évoquant les orientations et le déterminisme social, elle pose un constat : “"Je sors du collège avec le sentiment d’avoir proposé un marché de dupes à des gamins de 15 ans"”
Avec ces chroniques qui s’appuient sur le double regard de la journaliste spécialisée et de la vacataire avec une sorte de fraicheur optimiste, on évite le piège de l’analyse en surplomb et celui du regard un peu désabusé et cynique qu’on trouve trop souvent dans les récits de jeunes enseignants qui encombrent les rayons des libraires chaque année. On reproche trop souvent aux journalistes de ne pas bien connaitre leur sujet, de survoler les questions pour apprécier lorsque qu’on a quelqu'un qui fait l'effort d'aller voir plus dans le détail et de prendre le temps de s'immerger dans le sujet.
Une photo
Une photo peut-elle changer le monde ?
Peut-être pas. Elle peut cependant faire bouger l’opinion.
La photo d’un enfant mort que la mer a rejeté sur une plage de Bodrum en Turquie a ému le monde entier. Il semble presque endormi comme le font certains enfants : sur le ventre, presque à genoux dans leur lit, surpris par une fatigue soudaine. Mais ici ce n’est pas le sommeil mais la mort qui l’a figé dans cette position. Une mort indigne dans une embarcation qui tentait la traversée du rivage turc vers une île grecque à quelques dizaines de kilomètres. Et puis ensuite une autre photo vient nous interpeller. On voit le petit Aylan, 3 ans, originaire de Kobane, avec son frère de 5 ans (disparu lui aussi) au temps des jours heureux avec un gros nounours entre eux deux. Et c’est ce contraste qui rend cette mort (qui vient pourtant après des milliers d’autres) insoutenable et qui réveille les consciences. On ne “migre” pas par hasard ou par intérêt et encore moins pour profiter d’un quelconque avantage, on cherche à fuir un pays en guerre au péril de sa vie. On se réfugie.
Et ce drame est aussi l’occasion de rappeler que ce sont "plus de 13 millions d'enfants qui sont non scolarisés dans les pays affectés -directement ou indirectement- par les conflits armés" comme nous l’indique l’Unicef dans un rapport publié jeudi dernier . "En Syrie, le conflit a détruit deux décennies de travail en faveur de l'élargissement de l'accès à l'éducation." précise ce rapport Il y a déplacé 7,6 millions de personnes à l'intérieur du pays et contraint plus de quatre millions d'autres à se réfugier à l'étranger. Dans les pays voisins, plus de 700 000 enfants syriens ne sont pas à l'école, en particulier en Turquie et au Liban où les écoles sont surpeuplées et manquent de moyens.
Sur le site de l’UNICEF , on pourra lire le témoignage d’Aleksandar Lazovski, spécialiste de la protection sociale à l’UNICEF. Laissons lui le dernier mot de cette chronique : “La plupart des enfants auxquels j’ai parlé ne veulent pas partager leur vécu de la guerre. Ils préfèrent parler de leurs espoirs pour l’avenir, dont fait toujours partie un retour à l’école. L’autre jour, j’ai observé un groupe d’enfants de différentes nationalités qui jouaient à faire semblant qu’ils étaient en classe. Malgré le fait qu’ils ne parlaient pas tous la même langue, ils se sont organisés en « professeurs » et « élèves », partageant le même rêve éveillé d’être juste des « enfants normaux ». ” et il ajoute en conclusion “J’espère que bientôt les enfants que j’ai rencontrés auront ce qu’ils désirent le plus : une vie normale où ils pourront s’asseoir dans une vraie classe au lieu d’une classe imaginaire.”
Bonne Lecture...
Philippe Watrelot
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